Au quotidien 4 min
La voiture de demain : une révolution mentale
A 38 ans, Shaï Agassi a déjà un lourd passé : ce brillant jeune homme est l’invité de «think tanks» dans le monde entier et son dernier dada est de rendre la planète meilleure, moins polluée, notamment en la débarrassant de son addiction aux énergies fossiles.
La voiture de demain : une révolution mentale
La voiture de demain : une révolution mentale

L'oeuf de Colomb, version énergie

Si rendre la planète meilleure, moins polluée -notamment en la débarrassant de son addiction aux énergies fossile - passe par la disparition des voitures à essence, cela ne le trouble pas ! Pas de demi-mesures : il veut supprimer les moteurs à combustion sur les cinq continents : le monde selon Shaï Agassi circulera en voiture électrique.

Quoi de neuf dans les voitures électriques ?

Le concept lui-même n’est pas nouveau : l’électricité est l’avenir de l’automobile depuis un bon siècle.

Le problème, ce n’est pas le véhicule lui-même, c’est le carburant. Les batteries, elles, sont lourdes, chères, elles ont une courte durée de vie et prennent des heures à recharger.

Si on ne veut passer que  5 minutes à faire un plein, on a le choix de  l’essence et d’une autonomie de 500 km ou de l’électricité et d’une autonomie de 15 km. Pas exactement cornélien…

Agassi a approché le problème comme Christophe Colomb son œuf : il suffira de remplacer l’écosystème automobile tout entier par son « ERGO » (Electric Recharge Grid Operator).

Cela donne en français un acronyme moins séduisant : MSRE, maillage de stations de recharge électrique. Le nom ne fait pas rêver, mais le système si. 

Aujourd’hui, il y a une station essence à chaque coin de rue. Avec Ergo, c’est tout le territoire qui sera maillé de stations électriques où les automobilistes viendront recharger leur batterie ou procéder à un échange standard.

Cela prendra moins de temps qu’un plein d’essence et coûtera moins cher. Les batteries appartiendront à Ergo, dont le chiffre d’affaires sera fait en vendant de l’électricité, pas des batteries, comme les fabricants d’ordinateurs qui vendent surtout des logiciels ou ceux de photocopieuses qui chiffrent essentiellement des consommables.

Faire du monde un endroit meilleur

Le modèle d’Agassi n’a pas besoin de révolutions technologiques, ou de nouvelles inventions, seulement d’un changement de mentalité.
C’est pourquoi il a lancé son projet « Better Place » qui ouvre la voie au premier opérateur global de recharge pour véhicules électriques. 
La première contrainte était de trouver un pays pour tester le système en grandeur nature : puisque l’objectif était de monter un réseau, plus la base serait large, plus efficace serait le résultat. Pour des raisons évidentes, le choix idéal était une île : un parc automobile restreint, un maillage plus petit, un réseau routier réduit, donc une couverture plus aisée et des résultats facilement analysables. Le choix était simple : Agassi est citoyen israélien et son pays est une île virtuelle où la plus grande distance que peut parcourir un automobiliste est 380 km.

Electriques, d'accord, mais de vraies voitures

Il fallait aussi trouver un partenariat avec un constructeur automobile. C’est Renault qui a remporté le jackpot. La voiture du constructeur français pour le projet Better Place n’est pas une voiturette pour troisième âge. Elle s’appelle Fluenze ZE et joue dans la catégorie des Mégane : elle devrait passer de zéro à 60 km/h en 7 secondes et demie. Better Place a prévu d’en avoir 100.000 en circulation d’ici la fin 2011. Il y a quelques semaines, le PDG de Daimler, Dieter Zetsche, était interviewé dans un journal allemand. D’accord, ce n’est pas un scoop. Le scoop, c’est sa déclaration : d’ici 2010, une Mercedes et une Smart rejoindraient la Fluenze de Renault sur le marché des véhicules électriques. De son côté, Agassi a promis que 50 prototypes Renault rouleraient sur les routes israéliennes cet hiver et que 1000 stations service seront déjà à leur disposition pour les recharger.

Mais un seul essai ne suffit pas et quand vous êtes Shaï Agassi, vous cherchez quelque chose de plus difficile que votre propre pays pour valider votre système.

Le Danemark représentait la parfaite antithèse d’Israël : son climat est froid, particulièrement éprouvant pour les batteries, il a plus de pétrole qu’il n’en consomme et c'est un pays où la conscience environnementale est très forte.

En témoigne DONG Energy, une société danoise d’énergie intégrée qui achemine l’énergie « des plateformes à votre porte » et dont le site web la décrit comme « synonyme de fournisseur d’énergie fiable et d’utilisation éthique de nos ressources naturelles ».

Pas étonnant que Better Place lui apparaisse comme une solution pour un de ses problèmes majeurs : comment économiser l’énergie éolienne qui constitue 18% de son parc ?
L’énergie du vent possède une image très positive en termes d’environnement, mais au plan du rendement, elle est d’une fiabilité très relative car le vent souffle (ou ne souffle pas) quand il veut et à la vitesse qu’il choisit. Stocker cette énergie s’avère aussi coûteux qu’inefficace aussi, au lieu d’acheter des batteries très onéreuses pour conserver l’énergie excédentaire quand il y avait lieu, la société en faisait cadeau (oui, gratuitement !) à ses voisins allemands et suédois.
Better Place est arrivé au bon moment et au bon endroit : ses voitures vertes représentent un excellent débouché pour l’énergie éolienne excédentaire.

Et la Planète ?

D’après Shaï Agassi,  quand son projet aura atteint sa vitesse de croisière, il réduira de 20% les émissions mondiales de CO2.

Daniel Roth, qui écrit pour www.wired.com, l’a interviewé en août 2008 et Agassi lui a déclaré : « En achetant aussi une énergie propre, nous réduisons le prix des électrons propres, si bien que dans dix ans, ils sont moins chers que ceux à base de charbon.
De toute façon, d’ici là, on ne construira plus d’usine de charbon.  Et voilà qui permet encore de supprimer 40% d’émissions de CO2.
C’est le traité que Tony Blair essaie de faire signer pour les objectifs de 2050. Les 60% de réduction de nos émissions de CO2, on peut y arriver en 2030, au bout de dix ans d’utilisation de la voiture électrique. »

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