Déchets plastiques : bousculons les idées reçues
Des chiffres qui donnent le tournis
En 2011, près de 300 millions de tonnes de plastiques ont été produites de par le monde. Ce chiffre ne vous évoque pas grand-chose ? Alors sachez qu’en 1950 la production mondiale de plastique s’élevait à 1,5 tonne, soit 200 fois moins ! On le sait, les plastiques sont très présents dans notre vie de tous les jours, c’est donc une bonne raison pour se pencher très sérieusement sur leur recyclage. Les solutions sont nombreuses et surtout très majoritairement efficientes, car même en faisant abstraction des avantages purement écologiques, recycler du plastique peut s’avérer parfaitement rentable d’un point de vue financier.
Toujours plus de succès !
Les industries européennes consomment approximativement le quart de la totalité des plastiques mis sur le marché (47 millions de tonnes). Si les fabricants d’emballages et les entreprises du bâtiment en sont les plus gros consommateurs, rares sont aujourd’hui les industriels qui n’utilisent pas les formidables capacités des matériaux plastiques dans la conception de leurs produits. Pour ne citer qu’un exemple, la part des plastiques dans les automobiles ne cesse de progresser. Aujourd’hui, les polymères représentent près de 20% de la masse d’un véhicule contre à peine 10% il y a encore vingt ans. Pourquoi un tel succès ? Tout simplement parce que ces matériaux ont des qualités que les autres n’ont pas : ils sont légers, résistants, malléables, imputrescibles… Les plasturgistes innovent et proposent de nouveaux polymères toujours plus étonnants. S’il est un domaine où la recherche est particulièrement active, c’est bien celui-ci.
Des durées de vie plus ou moins longues
Heureusement, les 47 millions de tonnes de plastique utilisées par l’industrie européenne n’ont pas pour vocation de devenir immédiatement des déchets. Certains plastiques, notamment ceux destinés aux entreprises du bâtiment et des travaux publics, ont une durée de vie de plusieurs décennies. C’est le cas des fenêtres en PVC, des câbles électriques ou encore des isolants, qui ne se changent pas tous les ans, loin de là. A contrario, les polymères réservés aux emballages ont, eux, une durée de vie très limitée. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 40% des objets en plastique ont une durée de vie très courte, souvent de quelques mois. Ce sont donc bien eux qui deviendront assez rapidement des déchets.
Fin de vie ou nouvelle vie ?
En Europe, ce sont 25 millions de tonnes de plastiques qui arrivent en fin de vie tous les ans. L’expression « fin de vie » n’est toutefois pas appropriée. Et pour cause, ces objets ne sont, pour la plupart, pas abîmés et conservent une forte valeur intrinsèque. Ils peuvent être réutilisés de multiples façons. Si les enfouir au fin fond d’une décharge est tout bonnement une ineptie tant sur le plan industriel qu’écologique, il n’empêche que, aujourd’hui encore, 40% de ces matériaux usagés sont enterrés. Certes, lorsqu’ils sont proprement enfouis dans des lieux dédiés, ils ne participent à aucune pollution visuelle, mais gare aux décharges mal contrôlées !
Quelle nouvelle vie ?
Soyons tout de même un peu plus précis. Quand on parle de 40%, il ne s’agit que d’une moyenne européenne. Parmi les 29 pays européens (Union + Suisse et Norvège), certains sont bien meilleurs que d’autres. Ainsi, les Suisses réutilisent quasiment 100% de leurs déchets plastiques post-consommation contre à peine plus de 10% à Malte. Est-ce culturel ? Est-ce lié à l’impulsion des gouvernants ? A une meilleure compréhension des enjeux ? Difficile de répondre tant ce problème est complexe, car il concerne avant tout les utilisateurs finaux : les industriels, mais aussi et surtout les particuliers beaucoup plus difficiles à convaincre, à discipliner…
Valoriser n'est pas forcement recycler
Quand il est question de « vie après la poubelle » d’un déchet quel qu’il soit, les spécialistes parlent plus volontiers de valorisation. A cela, il faut distinguer deux types de valorisation : la valorisation matière et la valorisation énergétique. La première consiste à réintroduire la matière dite usagée dans la production d’un nouvel objet. La seconde, quant à elle, revient à produire de l’énergie grâce au pouvoir calorifique du déchet. L’énergie produite pourra ainsi devenir chaleur pour le chauffage urbain et/ou électricité. Quels sont les meilleurs choix ? Difficile de répondre à cette question tant ils sont dépendants du contexte et des contraintes économiques, des besoins énergétiques de chaque nation mais aussi… des mentalités des habitants.
Faire du neuf à partir du vieux !
C’est bien là toute la finalité du recyclage ou, pour utiliser un terme plus professionnel, de la valorisation matière. Pour le grand public, c’est la formule magique : la solution ! Un avis que ne partagent pas obligatoirement les experts qui disposent de toutes les données pour savoir s’il est intéressant, tant économiquement qu’écologiquement, de recycler tel ou tel matériau. En premier lieu, tout n’est pas recyclable. Certaines matières complexes, souvent fabriquées à partir de différents polymères, ne le peuvent pas l’être, soit parce que les techniques ne sont pas encore inventées soit, plus simplement, parce que ce serait économiquement irréaliste. Parmi celles-ci on trouve les papiers paraffinés, le verre contenant du plomb, certains bois traités, les plastiques collés à d’autres supports…
Au commencement était le tri
Pour les plastiques, le tri est une tâche très exigeante tant il existe de polymères différents. Une fois récupérés, les déchets sont retriés, lavés, séchés et fragmentés par broyage. C’est seulement après ces différentes opérations que ces matériaux seront aptes à être réutilisés. Outre cette valorisation dite mécanique, il existe un autre process, encore rarement utilisé, qui permet de valoriser les plastiques chimiquement. Les polymères sont alors dissociés par traitement chimique pour redonner des matières premières. La valorisation chimique s’applique notamment aux matériaux thermoplastiques. Elle a lieu par chauffage et par ajout de réactifs chimiques. Bien entendu, l’ensemble de ces procédés nécessite de l’énergie et de la main d’œuvre. Et tout cela a un coût et une empreinte écologique. Ce sont autant d’éléments que les professionnels du recyclage mettent dans la balance quand il est question de parler de la « vie après la poubelle ».
Valorisation chimique : solution de l'avenir ?
L’alchimie fait son grand retour. Il n’est plus question de transformer du plomb en or mais plutôt le plastique en fin de vie en pétrole. Un juste retour aux sources donc … Ce projet fait rêver les chimistes depuis déjà de longues années. Pour beaucoup, il ne s’agissait que d’un serpent de mer, mais il semblerait bien que, cette fois-ci, une jeune entreprise américaine ait trouvé la bonne formule chimique pour faire de nos déchets plastiques un nouveau gisement d’or noir. Le secret est bien gardé mais, selon cette société, la technique mise au point permettrait de traiter tous les types de plastiques quel que soit leur état. Au final, plus de 75% du poids de départ est transformé en pétrole brut de synthèse, prêt à être raffiné. Le reste se partage en gaz et en déchet final (moins de 10%). Il suffit d’une unité d’énergie pour en produire cinq soit un rendement de 5 pour 1 ! Au cours actuel du baril, le procédé serait déjà rentable. Les grands groupes pétrochimiques semblent s’intéresser de très près à cette nouvelle technologie. Serait-ce le début d’une révolution ?
1 Kg de plastique = 1 litre de fuel
On l’a vu, et même si on a un peu tendance à l’oublier, le recyclage n’est pas forcément la panacée. Pour certains objets plastiques, il est beaucoup plus intéressant de les incinérer, non seulement parce qu’ils ont un très haut pouvoir calorifique, mais aussi parce que leur recyclage n’est pas toujours rentable d’un point de vue économique. Rien qu’en Europe, si tous les pays décidaient de faire un effort pour mieux valoriser énergétiquement les plastiques plutôt que de les mettre en décharge, ce serait plus de 1 milliard de barils de pétrole qui pourraient être économisés, allégeant ainsi la facture d’hydrocarbures de 80 milliards d’euros. A l’heure de la crise de la dette et de l’envolée des prix du pétrole, ce chiffre ne peut laisser insensible.
L'industrie plastique se mobilise
Dans tous les pays européens, la quantité de plastiques finissant en décharge est heureusement en baisse constante, et ce malgré un accroissement des déchets post- consommation.
Aujourd’hui les industriels du plastique militent contre la mise en décharge des polymères, qu’ils considèrent comme une absurdité. La filière plastique bat le rappel auprès de ses acteurs en vue de tendre vers le zéro plastique en décharge à l’horizon 2020. Tous sont d’accord pour dire que c’est un défi à relever, un défi tout à fait réaliste !