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Jeux olympiques : les polymères de retour dans l’arène
Pas ou peu de public ! Les Jeux olympiques de Tokyo ne resteront pas dans les annales des Jeux les plus festifs. Mais pour les athlètes, le plus important sera toujours la performance et les records. Le matériel sera ainsi soumis une fois de plus à rude épreuve, tout comme les polymères qui le constituent.
Jeux olympiques : les polymères de retour dans l’arène
Jeux olympiques : les polymères de retour dans l’arène

Les plastiques creusent l’écart

Les Jeux olympiques et paralympiques d’été, c’est plus d’une centaine de disciplines différentes et près de 15 000 athlètes qui s’affrontent au cours de plus de 400 manifestations. Des chiffres qui illustrent parfaitement l’importance de l’événement !

Tous ces athlètes, ou presque, doivent beaucoup aux plastiques, qu’ils soient constitués d’un ou de plusieurs polymères, comme dans le cas des matériaux composites. Les raisons sont nombreuses, et nous les avons fréquemment évoquées dans Plastics le Mag (voir liens à la fin de cet article).

 

Les fauteuils de course de compétition sont Les fauteuils de course de compétition sont composés de fibres carbone et de résine époxy et pèsent moins de 10 kg. Leur forme leur permet des départs canons.

Pourquoi un tel succès ? Les propriétés intrinsèques de ces matériaux permettent d’en faire à peu près tout ce que l’on souhaite : perche de saut en hauteur légère, flexible et quasiment incassable pour aller tutoyer les sommets, vêtements confortables qui n’entravent pas les mouvements, chaussures qui amortissent les chocs et dont l’élasticité permet de gagner ces quelques « pouillèmes » de seconde qui font les records…

Sans oublier les balles et ballons, tous en plastiques, les innombrables protections, les prothèses des athlètes amputés ou encore les fauteuils roulants aussi légers que maniables permettant des accélérations fulgurantes et de rapides rotations sur place… La liste est longue !

Essai transformé pour les polymères

Dans le sport, comme dans beaucoup de domaines, les polymères sont à la source de nombreux progrès. Si les sportifs ont aujourd’hui des programmes d’entraînement qui en font des machines à vaincre, le matériel peut faire la différence dès lors qu’il s’agit de gagner quelques centièmes de seconde ou quelques centimètres. Ainsi, en une vingtaine d’années, les chaussures ont perdu 50% de leur poids pour peser, aujourd’hui, moins de 100 g. Autant de grammes en moins à traîner lorsque l’on cherche la performance au saut en longueur, par exemple… Sans oublier les chaussures des basketteurs dont les coussins d’air et les mousses polymères accélèrent le rebond.

Quant aux footballeurs, et même aux coureurs, leurs semelles sont le plus souvent en Pebax©, un polymère développé par le français Arkema. Si sa formule est gardée secrète, on sait toutefois qu’il s’agit de l’association d’un polyéther, un polymère souple, et d’un polyamide, un polymère rigide. Depuis son apparition, il a mis au rencart les polyuréthanes thermoplastiques qui étaient utilisés jusque-là. Le Pebax© est à la fois plus léger (d’environ 20%) et plus « explosif ».

 

Les semelles en Pebax© amplifient le rebond. De quoi grappiller quelques millièmes de seconde.

Il permet également le maintien de la chaussure lors de brusques changements de direction. Cette semelle serait capable de se plier un million de fois sans perdre ses propriétés, même dans des conditions climatiques extrêmes ! 

Les plastiques en haut de la vague

Les Jeux olympiques, même par temps de covid, sont toujours un spectacle inégalé et plein de surprises. C’est particulièrement vrai pour les nouveaux sports accueillis lors de chaque olympiade. Des sports originaux et inédits susceptibles de capter l’attention d’un public plus jeune en quête de sensations. Ainsi, surf, escalade sportive, karaté, baseball (et softball, son dérivé), skateboard seront de la partie à Tokyo

 

Très facilement moulables, les polymères permettent de concevoir des surfs adaptés à chaque type de vague.

En surf comme en skateboard, le matériel aura toute son importance pour espérer monter sur le podium. Aux athlètes donc de faire les bons choix. Si pour le néophyte, un surf n’est qu’une vulgaire planche avec laquelle on fait des figures dans les vagues, il est en réalité un objet bien plus technique et complexe. Un surf est avant tout une forme plus ou moins concave conçue à la fois pour pouvoir pivoter facilement et pour glisser sur la vague. A chaque type de vague son surf. Parions que les surfeurs présents aux Jeux viendront avec une ribambelle de planches pour affronter toutes les conditions. S’ils ont été longtemps en bois, les surfs modernes sont aujourd’hui constitués de différents polymères, seuls matériaux capables de plus ou moins de rigidité selon le niveau de performance recherché. Mais ce n’est pas la seule raison. Les plastiques sont, en effet, les champions du moulage à qui l’on peut donner à peu près toutes les formes. Les surfs de compétition actuels sont désormais en composites à base de plastiques comme le polyéthylène hydrofuge, voire de fibres de carbone et de résine époxy. Quant aux ailerons, ils sont le plus souvent composés d’une fibre et d’une résine époxy.

Ça roule pour les polymères

Pour le skateboard, le problème est tout autre, puisque le choix d’une planche dépend du type d’épreuve. Pour simplifier, disons qu’il en existe deux principales : le street (épreuve de rue qui consiste à faire des figures sur des éléments que l’on trouve en ville, comme des escaliers, par exemple) et la rampe (épreuve sur une série de rampes que l’on aborde avec de l’élan pour faire des sauts, des vrilles, etc.).

Les skateboards de compétition sont le plus souvent en bois, et les trucks, les pièces fixées à la planche qui supportent les roues, sont en métal. Reste les roues qui, elles, sont entièrement en plastiques. Une roue est constituée de deux parties. Un noyau, réalisé dans un polymère assez dur et solide comme le polycarbonate, qui est destiné à recevoir le roulement à billes. La bande de roulement, ou la partie de la roue en contact avec le sol, est quant à elle en polyuréthane, un matériau assez souple et lisse qui permet une bonne vitesse. Ensuite, et c’est là toute la subtilité, les fabricants de roues testent constamment des grades de polymères et surtout de nouveaux additifs pour rendre les roues plus ou moins dures et plus moins sensibles à l’abrasion, selon ce que l’on attend d’elles. Il faut en effet savoir qu’une roue de skate « vit un enfer » lors des powerslides, ces figures qui consistent à tourner la planche de côté et à glisser sur les quatre roues, perpendiculairement à leur direction de roulement.

 

Les skateurs présents aux JO ne devront pas se tromper lorsqu’il faudra choisir la bonne roue. Le choix est large !

Les skateurs le savent : la roue universelle n’existe pas. Trop molle, elle aura plus d’adhérence mais n’autorisera pas les grandes vitesses. A l’instar des surfeurs, les skateurs devront se rendre à Tokyo avec un nombre impressionnant de roues afin de s’adapter aux spécificités des pistes et du climat qui influent sur l’adhérence. Sous ses apparences funs et décontractées, le skateboard est avant tout un sport mécanique, très dépendant de la qualité du matériel et donc des matériaux qui le constituent.

Les plastiques assurent

L’escalade sportive sera également l’une des nouvelles disciplines de cette édition tokyoïte. Ici aussi le matériel a son importance, comme nous l’expliquait dernièrement Angy Eiter, détentrice de plusieurs records du monde d’escalade .

Reste le karaté dans la liste des nouveaux sports proposés à Tokyo. Il est un peu l’exception, car le matériel ne joue ici aucun rôle dans la course aux médailles. En revanche, un bon tatami évite bien des blessures. Depuis longtemps, les tatamis utilisés pour les arts martiaux sont en mousses de polyéthylène ou de polyuréthane recouvertes de PVC. On n’a pas encore trouvé mieux pour amortir les chocs consécutifs aux chutes. A noter que, pour les mêmes raisons, ce sont également ces matériaux qui sont utilisés dans la conception des tapis de gymnastique. Certains sont enrichis d’ions d’argent pour empêcher la prolifération des bactéries, virus et champignons. Ils ont, de plus, le mérite d’absorber les mauvaises odeurs.

Les polymères rois de la piste

Le stade olympique et la piste d’athlétisme sont des emblèmes forts de chaque olympiade. Si chaque sport a ses aficionados, il n’empêche que l’athlétisme reste la discipline phare, celle qui peut attirer près d’un milliard de téléspectateurs dans le monde, comme lors de la finale du 100 m des JO de Londres en 2012. Battre un record olympique, c’est, pour un athlète, la gloire assurée… mais également pour la ville organisatrice des Jeux. Mexico restera à jamais associé à Bob Beamon, qui battit le record olympique de saut en longueur*. Cinquante-trois ans après, ce record n’a toujours pas été battu ! 
Une bonne raison donc pour chouchouter cette piste et mettre tout en œuvre afin de la rendre la plus rapide possible, en espérant que les athlètes auront les jambes pour aller chercher le record.

Le concepteur de la piste est ainsi dûment sélectionné, à travers le monde, parmi les entreprises capables de la créer. Pour Tokyo, c’est l’italien Mondo qui a été retenu. La composition exacte de la piste est ultraconfidentielle. Nous savons simplement qu’elle est un mélange de différents polymères, dont le caoutchouc pour son élasticité et son effet de rebond, le SBR (un copolymère du butadiène et du styrène) pour sa résistance mécanique et l’EPDM (éthylène-propylène-diène monomère) pour sa très bonne tenue aux intempéries.

 

La composition de la piste d’athlétisme est l’un des secrets les mieux gardés des Jeux olympiques. On sait simplement que quelques polymères sont de la partie…

* Ce record olympique de 8,90 m tient toujours. Cependant, le record du monde de saut en longueur est détenu depuis 1991 par l’Américain Mike Powell (8,95 m). Mais il ne s’agit pas d’un record olympique, car celui-ci a été battu lors de championnats du monde.

Liens :
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