Dissolution : un vrai bain de jouvence
Retour en grâce pour le polystyrène
Le groupe pétrolier français Total s’est lancé le défi de produire 30% de ses polymères à partir de matières recyclées de haute qualité d’ici à 2030. Pour ce faire, il s’est associé avec l’américain PureCycle Technologies, inventeur d’un processus capable de recycler par dissolution le polypropylène. L’objectif est d’assurer à cette matière recyclée les mêmes caractéristiques que la résine vierge. Elle pourrait donc être utilisée dans des emballages alimentaires.
Total s’intéresse également au recyclage du polystyrène par le même type de technologie. Le groupe a déjà entamé différentes phases de tests pour recycler de nombreux objets en polystyrène, comme des pots de yaourts, des composants d’électroménager ou d’isolation… Une part non négligeable de la production de polystyrène servant à fabriquer des pots de yaourts et des barquettes alimentaires, le groupe s’est donc associé avec différents partenaires dont le fabricant de produits laitiers Yoplait (General Mills) et le portugais Intraplas, une société experte dans l’extrusion de feuilles plastiques pour l’industrie agroalimentaire. Après plusieurs mois d’essais, le consortium est parvenu à élaborer un polystyrène recyclé chimiquement (rPS) présentant des qualités identiques à celles du polystyrène vierge. « Cette initiative constitue une avancée majeure pour construire avec l’ensemble de la chaîne de valeur une économie circulaire du polystyrène en France et contribuer à la réalisation de notre ambition d’atteindre 100% d’emballages recyclables ou réutilisables à l’horizon 2025 », indique Frédéric Chapuis, responsable stratégie emballages durables de Yoplait.
De nombreux pot de yaourt sont en polystyrène. Parvenir à les recycler en nouveaux pots de yaourt est un des enjeux majeurs du recyclage chimique. |
Le polyamide se regonfle
La fabrication des airbags génère environ 25 000 tonnes par an de déchets de tissus techniques à base de polyamide. A cela, il faut ajouter 100 000 tonnes d’airbags en fin de vie. Jusqu’alors, ces coussins composés d’un mélange de silicone et de polyamide ne pouvaient pas être recyclés car il était quasiment impossible d’en séparer les deux composants. Producteur de polyamide, Domo Chemicals dispose d’un processus qui associe très fin broyage et dissolution pour revenir au polyamide d’origine. Baptisé technyl®4earth®, ce procédé permet à Domo de proposer désormais un polyamide recyclé de haute qualité (PA6.6) destiné aux industries de l’automobile, de la construction, de l’électroménager ou des loisirs. Une analyse du cycle de vie menée sur ces polymères recyclés a démontré une réduction de 26% de l’empreinte carbone, une économie des ressources non renouvelables de 60% et une réduction de 70% de la consommation en eau par rapport au procédé conventionnel. Cette innovation est suivie de très près par l’industrie automobile et ses équipementiers qui visent à introduire 20% de matériaux recyclés dans leurs prochains modèles.
Polyloop, la solution maligne et pratique
Mondialement connue pour ses matériaux composites souples, le plus souvent à base de PVC, l’entreprise Serge Ferrari est engagée depuis plus d’une dizaine d’années dans le recyclage de ses produits. Dès 2008, le fabricant de toiles participait à l’aventure Texyloop, une technologie de recyclage par dissolution qui permet par exemple de séparer le PVC du polyester. Basé en Italie, le site de production baptisé Vinyloop a permis de recycler en une dizaine d’années plus de 13 millions de mètres carrés de matériaux. Grâce à cette technologie, ils ont trouvé une seconde vie sous la forme de films d’isolation pour terrasses paysagères ou de diverses membranes.
Fort de cette expérience, Serge Ferrari lançait il y a plus d’un an le projet Polyloop en reprenant une technologie de dissolution assez similaire. Les toiles composites en fin de vie sont broyées puis placées dans un solvant. Seul le PVC est dissous. Reste à filtrer le liquide obtenu et à séparer le solvant du polymère par évaporation pour récupérer du PVC vierge.
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Chez Serge Ferrari, on cherche à créer des unités mobiles pour recycler le PVC en fin de vie au plus près de son lieu de collecte pour abaisser l’empreinte carbone liée au transport des déchets. |
L’objectif est maintenant de développer des mini-unités de recyclage chimique. Installée dans un container facile d’utilisation, une unité permet de régénérer 300 kg de PVC composite en 3 h. Parfaitement adapté aux besoins des industriels pour le traitement de leurs déchets postindustriels ou post-consommation, ce procédé ne nécessite pas un apport trop important d’énergie. Une bonne idée pour encore abaisser l’empreinte carbone liée au transport des déchets. Chez Serge Ferrari, on espère installer les premiers modules dès l’an prochain.