Dépolymérisation : retour à l’essentiel
Qualité optique retrouvée pour le PMMA
Le PMMA (polyméthacrylate de méthyle), mieux connu sous ses noms commerciaux Altuglas® et Plexiglas®, est un polymère thermoplastique réputé pour sa transparence. Son utilisation est variée puisqu’il entre dans la fabrication de nombreux instruments optiques mais aussi dans les feux arrière de voitures, d’innombrables objets de décoration, des enseignes lumineuses, des PLV, des parapets… et dans les écrans plats LCD.
Technologie innovante, les écrans LCD connaissent depuis plus d’une dizaine d’années un succès fulgurant. Si leur durée de vie est satisfaisante, les utilisateurs ne les gardent pas longtemps tant ils aiment renouveler fréquemment leur équipement. Ce sont ainsi des milliers d’écrans qui sont mis au rebut tous les ans. Qu’en faire ? L’idée de recycler chimiquement le PMMA de ces écrans n’est pas nouvelle. Jusqu’à récemment, on y parvenait en les plaçant sur un lit de métal en fusion. Le PMMA retourne alors à son monomère initial. Efficace, cette technique a tout de même une limite : elle ne peut garantir le retour à un polymère de très haute qualité optique, ce qui empêche sa réutilisation dans la fabrication de nouveaux écrans LCD.
Les écrans à cristaux liquides font la joie de notre quotidien. Conçus à base de PMMA, ils étaient jusqu’alors très compliqués à recycler. Pour y parvenir, le process MMtwo, bien qu’encore à l’état de recherches, semble prometteur d’autant plus qu’il pourrait être relativement facile à dupliquer. |
Face à ce constat, un consortium européen a été créé en 2018. Baptisé MMAtwo (se prononce « matou »), il réunit 13 partenaires de 6 pays différents, dont Arkema, un des principaux fabricants de PMMA dans le monde, ainsi que des recycleurs, des transformateurs et même une université. L’objectif est de parvenir à régénérer un monomère d’une grande pureté à partir de tous types de déchets : produits électriques et électroniques, feux arrière de voitures, murs antibruit, serres agricoles… et écrans.
Deux ans après le lancement de MMAtwo, les premiers résultats sont déjà au rendez-vous ! Bien qu’encore au stade de développement, le procédé repose très schématiquement sur l’utilisation d’une extrudeuse que l’on chauffe à de hautes températures (autour de 400°C). Le monomère obtenu est pur à plus de 99%, soit une qualité quasi équivalente à celle du vierge.
Les résultats sont très encourageants, et le consortium cherche maintenant à sensibiliser toute la filière afin de mieux collecter le PMMA en fin de vie et, d’ici quelques années, de pouvoir alimenter plusieurs unités de recyclage sur tout le territoire européen.
Le PET ou le meilleur du recyclage mécanique et chimique
Le recyclage du PET (polyéthylène téréphtalate) est souvent le premier exemple qui vient à l’esprit lorsqu’on évoque le recyclage des polymères. Son emblème : la bouteille d’eau ou de soda.
Le PET est un des polymères qui se recycle le mieux. Les nouveaux procédés de dépolymérisation lui permettent de retrouver son état originel de monomère. L’ensemble des fabricants de boissons suivent de très près les avancés technologiques pour pouvoir proposer d’ici peu des bouteilles conçues à partir de PET recyclé. |
A ce jour, il est le seul polymère dont le recyclage mécanique est agréé au niveau européen pour le contact alimentaire et c’est, de loin, le plus recyclé. |
D’où l’idée de le recycler chimiquement par dépolymérisation pour revenir au monomère de base. Le néerlandais Ioniqa y est parvenu en utilisant un réactif à base d’eau et de glycol. Il a surtout réussi à recycler les bouteilles colorées que le recyclage mécanique ne peut pas traiter du fait de la présence de colorants. Avec Ioniqa, le PET est d’abord dépolymérisé après avoir été chauffé, puis décoloré grâce à un système magnétique (on n’en saura pas plus…).
D’un point de vue économique, le défi a été de rendre le procédé compétitif, partant du principe qu’il ne devait pas coûter plus cher que la fabrication du PET vierge, tout en émettant moins de CO2. Nombreux sont les fabricants de boissons, et non des moindres, comme Coca-Cola, qui se sont déjà rapprochés du néerlandais en vue de produire des bouteilles à partir de PET recyclé.
Autre solution, très originale, celle du français Carbios, qui s’appuie sur la dépolymérisation enzymatique pour recycler le PET. Il s’agit ici de tremper le polymère dans un bain d’enzymes qui rompent les chaînes polymères. Une solution prometteuse qui continue d’évoluer, puisque Carbios est parvenu à considérablement améliorer le temps de dépolymérisation. Sa technologie est maintenant capable de dépolymériser 90% d’un volume de PET en une dizaine d’heures, alors qu’il fallait, il y a encore peu, plusieurs semaines pour en dégrader 1% !
Voie royale pour le polystyrène
De nombreuses industries, automobile, électronique, santé, bâtiment ou encore emballage, utilisent les styréniques, dont le polystyrène, pour leur polyvalence. Ce sont eux aussi de bons candidats à la dépolymérisation.
Ineos Styrolution, leader mondial des styréniques, a publié les résultats finaux de ResolVe, un projet de recherche de trois ans (2017-2020) financé par le ministère fédéral allemand de l’Éducation et de la Recherche (BMBF) pour explorer le recyclage du polystyrène par dépolymérisation.
Piloté par Ineos Styrolution et la société de recherche Neue Materialien Bayreuth, en collaboration avec l’Université d’Aix-la-Chapelle, le rapport conclut que la dépolymérisation est une solution de recyclage très appropriée pour le polystyrène, qui promet de produire du polystyrène recyclé répondant aux normes de contact alimentaire. |
Le polystyrène est aussi un bon client à la dépolymérisation. Ce plastique, une fois recyclé pourrait trouver de nombreuses applications particulièrement dans l’industrie automobile qui cherche toujours à augmenter la quantité de plastiques recyclés dans ses productions. |