Paroles d'expert 4 min

Prothèses : du confort au record

Les matériaux plastiques et composites contribuent largement à l’optimisation des équipements des personnes amputées. S’ils sont synonymes de confort au quotidien, ils rendent également possibles la pratique d’activités physiques, voire l’accomplissement de véritables exploits. Entretien avec Christophe Lecomte, technical lead feet au département recherche et développement du siège d’Össur (Reykjavik, Islande), et avec Monique Jenni, marketing manager d’Össur Europe (Son-en-Breugel, Pays-Bas)
Prothèses : du confort au record
Prothèses : du confort au record

Össur existe depuis plus de quarante ans. Quelle solution a marqué ses débuts ? 

Tout a commencé avec l’invention du manchon (l’interface entre la peau et l’emboîture) en silicone et a continué avec la création de gammes de pieds et de genoux. Nos produits permettent d’améliorer la vie d’un grand nombre d’amputés. Aujourd’hui, Össur est l’un des leaders mondiaux en prothèses de membres inférieurs et propose également une gamme complète d’orthèses.

Justement, quelle est la différence entre une prothèse et une orthèse ?

Une prothèse est un dispositif qui supplée à un membre ou à une articulation. Elle remplace un pied, un genou, etc. L’orthèse, quant à elle, compense, assiste ou stabilise un élément corporel. Les ceintures lombaires ou les genouillères, par exemple, sont des orthèses.

 

 

Grâce au silicone, le manchon Iceross® a été une vraie révolution. En quoi cette invention était-elle si novatrice ?

Créé au début des années 1980, le manchon en silicone Iceross® s’est révélé un moyen innovant pour faire le lien entre la jambe et le reste de la prothèse. En effet, ce matériau adhère parfaitement à la peau et assure une parfaite connexion avec les autres éléments de la prothèse. Le silicone constitue aussi une interface souple qui soutient le membre amputé. Imaginez qu’avant cette invention on utilisait des chaussettes et des sangles. Celles-ci rendaient la prothèse inconfortable et lourde.

 

 

 

 

 

 

 

Quels sont les principaux matériaux entrant dans la composition de vos produits ? 

Nous utilisons plusieurs types de silicone, chacun offrant des propriétés mécaniques différentes en matière d’élasticité et de raideur. Beaucoup de nos pièces sont également en titane ou en aluminium de qualité aviation du fait de leur résistance mécanique et de leur faible densité. Les matériaux composites sont aussi très présents dans nos produits. Les plus employés sont la fibre de carbone et la résine époxy. 

Chacun de ces matériaux procure d’importantes fonctions et qualités aux produits. La résistance à l’usure, la flexibilité et la légèreté notamment.

Qu'ont apporté les évolutions des matériaux plastiques et composites du point de vue du patient et en terme de production ?

Plusieurs développements ont donné lieu à la conception de nouvelles orthèses et prothèses plus légères et résistantes. Il faut savoir que la prothèse est portée du lever jusqu’au coucher, donc chaque gramme compte. Par ailleurs, elle doit être solide afin de subir des charges répétées.
La technique des produits préimprégnés a totalement transformé les habitudes de production des pièces composites tout en les rendant plus fiables et de meilleure qualité. Cette technique permet d’intégrer, directement lors du moulage, un renfort comme la fibre de verre ou le carbone à une résine thermoplastique.
Le développement des adhésifs a de son côté permis de remplacer les assemblages mécaniques standard avec vis ou rivets. Le temps d’assemblage a ainsi été diminué de même que le poids des produits, ce qui a conduit à améliorer la résistance à la fatigue.

Enfin, recourir aux matériaux composites dans les pieds a constitué l’un des plus grands changements dans le monde de la prothèse. La fibre de carbone dans les lames de pieds (éléments qui favorisent une démarche plus souple et naturelle) a entraîné une capacité d’absorber les chocs et de restituer l’énergie emmagasinée.

 

Grâce à vos innovations technologiques, les amateurs comme les sportifs peuvent continuer à pratiquer leurs activités physiques. Pouvez-vous nous préciser les équipements développés et pour quels sports ?

Plusieurs types de pieds ont été développés pour les activités sportives. Dans un premier temps, nous avons ajouté aux lames de pieds des absorbeurs de chocs. Ils sont similaires à ceux utilisés dans les fourches de VTT. Ces prothèses peuvent donc être portées tous les jours, mais elles sont également très fonctionnelles pour la pratique de sports collectifs notamment. Ensuite, nous avons créé des lames de pieds pour la course de fond ou le jogging. Le pied Flex-Run par exemple est doté d’une lame en forme de C conçue pour les amputés qui veulent participer à des courses longues. Ce type de lame diminue les efforts supportés par la jambe amputée et le dos. Plus récemment, nous avons réalisé le modèle Cheetah, un pied de course dédié aux compétitions paralympiques comme le 100 mètres et le 400 mètres.

 

 

Vous êtes partenaires de certains athlètes, dont le célèbre Oscar Pistorius, champion du monde paralympique de sprint. Quelles sont les particularités de ses prothèses ?

Oscar Pistorius utilise justement les lames Cheetah. Ces lames en fibre de carbone absorbent les chocs à l’attaque du talon et restituent en partie cette énergie. Elles sont légères et peuvent être soumises aux efforts très importants que requiert le sprint.

Les innovations apportées aux équipements des athlètes bénéficient-elles à l'ensemble des prothèses ?

Une grande partie des innovations développées pour les athlètes se retrouvent dans l’ensemble des prothèses, car l’un de nos buts est d’améliorer la mobilité des amputés. Il y a encore dix ans, il était très difficile pour un amputé de pouvoir participer à des activités sportives. D’une part, les produits le permettaient peu et, d’autre part, le prix des prothèses était élevé. Aujourd’hui, les produits ont beaucoup évolué, et la haute technologie est de plus en plus accessible à l’ensemble des clients. C’est primordial étant donné que plusieurs études montrent que les personnes amputées qui gardent une activité physique, même faible, ont moins de problème de santé par la suite.

 

Quelques champions de la «Össur Team»

– Oscar Pistorius (sud-africain ; sprint), jeux paralympiques en Chine (2008) : médaille d’or au 100 mètres, médaille d’or et record paralympique au 200 mètres et médaille d’or et nouveau record mondial au 400 mètres.
– Marlon Shirley (américain ; saut en longueur), championnats paralympiques nationaux américains (2007) : médaille d’or au 100 mètres.
– Marie-Amélie Le Fur (française ; sprint et longueur), IPC championnats du monde en Nouvelle-Zélande (2011) : médaille d’or au 100 mètres et au 200 mètres ; jeux paralympiques en Chine (2008) : médaille d’argent en longueur et au 100 mètres.
– April Holmes (américaine ; sprint), championnats du monde paralympiques en Nouvelle-Zélande (2011) : médaille de bronze au 100 mètres ; jeux paralympiques en Chine (2008) : médaille d’or au 100 mètres.

 

 

Össur

Fondée en 1971, la société islandaise Össur a acquis une vaste expertise dans la conception et la fabrication des produits orthopédiques non invasifs. 
La société doit son nom à Össur Kristinsson, un prothésiste islandais qui, au début des années 1970, s’est focalisé sur la conception d’une meilleure interface pour les emboîtures prothétiques. Il ne tarde pas à découvrir les propriétés idéales du silicone et à les mettre à profit sous la forme du manchon Iceross®. Peu de temps après, son invention allait aider des milliers d’amputés à travers le monde à fixer leurs prothèses de manière beaucoup plus efficace et plus confortable que jamais.

POUR EN SAVOIR PLUS

www.ossur.fr

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