Les composites ne manquent pas d'audace
Des ponts en plastique, solides et économiques
Le 29 octobre 2002, un char Sherman de 34 tonnes franchissait le pont de West Mill dans l'Oxfordshire, en Grande-Bretagne. Pas pour les besoins d'un film mais pour tester la charge, avant sa mise en service, du premier pont routier à structure composite d’Europe.
Avant cette date, seules des passerelles piétonnes en composites avaient déjà été réalisées. Avec ce pont routier, le plastique renforcé de fibres de verre a montré qu’il pouvait rivaliser avec le béton armé des ponts traditionnels. Son principal atout est la préfabrication des structures qui, en facilitant la mise en œuvre, réduit la durée des chantiers… Et les perturbations du trafic.
Construit dans cette optique, en 2008, dans le Land de Hesse, en Allemagne, le pont de Friedberg a été installé en moins d’une semaine.
Il est composé d’un tablier en fibres de verre, collé à deux poutres d’acier et recouvert d’un plancher en béton polymère (résine époxy et silicate). Malgré ses 27 m de long et ses 5 m de large, il ne pèse que 80 tonnes.
Plus étonnant encore, le premier pont en plastique recyclé d'Europe, a été ouvert, fin 2011, sur la rivière Tweed, au Pays de Galles. Conçu pour le trafic automobile, il a été construit grâce à une cinquantaine de tonnes de bouteilles d'eau et monté en deux semaines seulement.
Haubans d'essais avec les composites
Les matériaux composites sont-ils destinés à supplanter l’acier des haubans de ponts suspendus ? Sur le plan technique, rien ne s’y oppose car ils sont parfaitement adaptés à la configuration de ce type d’ouvrages.
Dotés d'une très haute résistance à la rupture et à la fatigue, sans risques de déformation, les câbles composites sont, de plus, insensibles à la corrosion. Leur légèreté, enfin, avec une densité cinq fois moins élevée que l’acier, constitue un avantage évident.
Pays pionnier, le Japon a ouvert la voie, dès 1977, en renforçant le pont de Kurushima avec des câbles composites de plus de 500 mètres. Bien adapté au risque sismique, cette technique a été ensuite adoptée pour le haubanage complet d’une trentaine de ponts suspendus dans l’archipel.
Adoptée aussi en Amérique du Nord, elle a été introduite plus tardivement en Europe. D’abord en Suisse, en 1996, pour le pont routier de Winterthur, avec un haubanage composite doté d’un monitoring par fibres optiques. Puis au Danemark, en 1999, pour la passerelle d’Herning. Dernière en date, une passerelle à haubans composite a été construite, en 2002, à Laroin, dans les Pyrénées françaises.
Quel sera le prochain défi ? Pour s’en faire une idée, des chercheurs ont envisagé la construction d’un pont suspendu sur le détroit de Messine (3300 mètres). Leur simulation a montré qu’il faudrait alors environ 156000 tonnes de câbles d’acier mais seulement 10000 à 15000 tonnes de composite. Seul problème, cela représente près de la moitié de la production mondiale de ce type de matériau … Beaucoup trop, donc, pour un seul pont !