Au quotidien 8 min
Sécurité routière : les plastiques taillent la route
Affirmer que les plastiques utilisés dans les véhicules le sont à des seules fins d’allègement est un raccourci bien rapide… Les polymères contribuent également à la sécurité des automobilistes et des autres usagers de la route.
Sécurité routière : les plastiques taillent la route
Sécurité routière : les plastiques taillent la route

Les plastiques, as de la sécurité rapprochée

La sécurité routière porte autant sur la sécurité des piétons et des deux roues, cyclistes et motards, que sur les occupants des véhicules. Si les avancées en la matière sont moins spectaculaires, elles méritent toutefois d’être saluées ici puisque les polymères y jouent aussi un rôle essentiel.

De la moto au vélo, l’airbag se démocratise

La généralisation des airbags n’a que deux décennies, mais la technologie de ces coussins qui se gonflent se décline aujourd’hui dans moult endroits. On en trouve dans les blousons voire les pantalons des motards, dans les gilets des skieurs de l’extrême et même, depuis peu, sur les motos ou les casques de vélos.
Si la technologie est sensiblement la même, tout comme le matériau (du polyamide), l’innovation repose surtout sur la forme que l’airbag prendra une fois gonflé.

Côté moto, le japonais Honda ouvre le bal en 2006 en équipant la puissante routière Gold Wing du tout premier airbag. Celui-ci se trouve au niveau du réservoir et se déclenche en cas de choc frontal pour empêcher le pilote de passer par-dessus le guidon ou de s’y encastrer. Une avancée qui ne suffit pas à le protéger dans le cas – assez fréquent – de choc latéral.

© Honda

Le japonais Honda est le premier constructeur à avoir équipé l’une de ses motos d’un airbag intégré.

C’est l’une des raisons qui poussent les équipementiers à concevoir des airbags en polyamide qui ont la forme de gilets sans manches, et qui se portent par-dessus le blouson. Ils sont reliés à la moto par une ficelle qui percute la bouteille de gaz de l’airbag en cas d’éjection, ou encore munis d’un capteur capable de détecter un choc. C’est le même principe qui est utilisé depuis des décennies dans les gilets de sauvetage des marins. (voir notre article)

Cependant, les choses devraient évoluer encore grâce à Honda qui, début 2023, déposait une série de brevets pour un nouveau type d’airbag pour moto. Une fois de plus, le constructeur a fait le choix de l’installer directement sur la moto. Dans les faits, à l’instar des voitures, il ne s’agit plus d’un, mais de plusieurs sacs gonflables. Le premier se déploierait depuis l’arrière de la selle et viendrait s’enrouler autour du torse du pilote. Le second serait situé entre ses jambes et se déploierait derrière son dos. Une fois gonflés, les airbags se désolidariseraient de la moto pour rester enroulés autour du pilote, protégeant son corps en cas de glissade mais surtout du choc contre un véhicule arrivant en sens inverse, par exemple. De leur côté, l’italien Piaggio et le suédois Autoliv, leader mondial des systèmes d’airbags pour les voitures, se sont récemment associés pour le développement d’un airbag adapté aux deux roues. Monté directement sur le châssis, d’abord des scooters puis des motos, il se déploierait en quelques millisecondes.

Les cyclistes eux aussi ont droit désormais à leur airbag, puisqu’un modèle leur est spécialement destiné. Commercialisé depuis peu par le suédois Hövding, il se présente sous la forme d’une minerve. Muni de différents capteurs, il se déploie en cas de chute en 1/10e de seconde autour de la tête du cycliste. S’il remplace le casque, et s’il est moins contraignant, il coûte plus cher et reste à usage unique.

© Hövding

Selon le fabricant suédois concepteur de l’airbag pour cycliste Hövding, ce dernier protégerait huit fois mieux qu’un casque. Cette innovation a été primée en France par le prix de la Sécurité routière

Casques : les plastiques sortent de leur coquille

Le casque est aujourd’hui un élément de sécurité incontournable pour tout usager d’un deux-roues, motorisé ou non. Celui des motards est bien connu, sa calotte (la partie extérieure) est le plus souvent en polycarbonate, un matériau résistant qui se moule par injection. Les modèles plus haut de gamme peuvent être en fibres de verre et résine époxy. Le fin du fin repose sur un composite de fibres de carbone et d’aramide et d’une résine époxy. L’intérêt est double : c’est un casque ultra-protecteur et très léger, ce qui le rend moins fatigant pour les cervicales. En polystyrène expansé ou en mousse de polyester enrobé par un tissu en fibres synthétiques comme le polyamide ou le polyester, pour faciliter le nettoyage, l’intérieur joue le rôle d’amortisseur.

© Piero

Jet, intégral, modulable… tous les casques de motos reposent sur la même conception : une calotte en polycarbonate voire en matériaux polymères composites ultra-résistants et des plastiques moussés pour absorber les chocs.

Si tous les casques homologués protègent efficacement, la différence entre les gammes plus ou moins hautes se situera dans les détails, comme le nombre d’aérateurs permettant à l’air de mieux circuler ou encore la qualité des visières, le plus souvent en polycarbonate, qui peuvent recevoir un traitement antibuée, lequel participe ainsi à sa façon à la sécurité.

Le casque peut même se faire intelligent. Kosmos Smart Helmets, une start-up française, propose depuis peu le premier casque connecté. Celui-ci intègre un feu stop composé de leds, des mini-ampoules en plastique peu consommatrices d’énergie et très légères. Il n’est pas sans rappeler le troisième feu stop des voitures. Mieux encore, ce casque est relié au smartphone du pilote et est capable d’envoyer un message de secours en cas de choc violent.
Les prochaines générations de casques de moto pourraient bien intégrer un airbag. Effet redondant ? Ce n’est pas certain, car le fabricant italien de casques Airoh et le suédois Autoliv, tous deux à l’initiative de ce projet, ont montré que l’airbag est un parfait complément au casque pour réduire les risques de blessures graves à la tête en cas d’accident. L’airbag serait placé au sommet du casque et viendrait se déployer en couronne. Ce casque du futur est encore en cours de développement, mais certains motards l’attendent déjà de pied ferme…

Plus simples, les casques de vélo ne sont pas pour autant à prendre avec légèreté – même si c’est la légèreté qui est le plus souvent recherchée ! Leur coquille est généralement en PVC ou en polycarbonate, parfois en ABS. Quant à l’intérieur, c’est ici aussi le polystyrène qui domine sous sa forme expansée ou moussée. Un polymère léger aux très bonnes capacités d’absorption. Pour les modèles en mousse de polystyrène, une armature supplémentaire est indispensable. Celle-ci peut être composée de polyamide, de kevlar voire d’aramide renforcée au kevlar. Quelle que soit sa forme, le polystyrène absorbe les chocs violents en se déformant. Cette déformation, liée au tassement du matériau, est essentielle car elle réduit l’effet rebond et permet ainsi de protéger le crâne. Malheureusement, le polystyrène ne reprend jamais sa forme initiale et, une fois compressé, il perd en efficacité. C’est pour cette raison qu’il est vivement conseillé de changer son casque après un choc violent.

© Daniela Jakob

Le principe du casque de vélo est le même que celui du casque de moto bien que sa conception soit généralement plus simple

Avec le développement de la mobilité durable, le nombre de cyclistes est en pleine croissance et pousse les fabricants de casques à innover constamment. Ainsi fleurit sur certains modèles haut de gamme le petit logo MIPS pour Multi Directional Impact Protection System. Cette technologie s’inspire du liquide rachidien dont le rôle est d’éviter que le cerveau ne vienne percuter la boîte crânienne en cas de choc provoquant des lésions cérébrales. Dans les faits, ce système se compose d’une calotte additionnelle en polycarbonate placée à l’intérieur du casque. Celle-ci n’est pas plaquée sur la coquille mais reliée à elle par des petites tiges d’élastomère créant ainsi un petit coussin d’air. En cas de choc, la calotte et la coquille glisseront de quelques millimètres l’une sur l’autre permettant aux forces rotationnelles de mieux se dissiper et d’éviter que le cerveau n’entre en contact avec la boîte crânienne.

L’accessoire se fait indispensable !

Ce sont le plus souvent les accessoires qui permettent de mieux protéger les piétons, cyclistes et motards en cas d’accident. La liste est longue, presque aussi longue que celle des polymères qui les constituent. Ainsi les vestes des motards peuvent se garnir d’épaulettes, de coudières, de plaques dorsales… en polyuréthane, polyéthylène voire en fibres de carbone. Elles protègent les articulations et évitent les brûlures en cas de glissades. Les vêtements et les gants ne sont pas en reste et laissent la place belle au Cordura®, un polyamide qui résiste particulièrement bien à l’abrasion.

 

Inclure des milliers de microbilles en verre dans une veste en polyester permet de la rendre visible de nuit jusqu’à 300 mètres. Cette veste développée par Urban Circus et Continental est un gage de sécurité pour de nombreux cyclistes.

La palme de l’innovation revient pour le moment à la marque Urban Circus, qui a développé avec Continental, le fabricant de pneumatiques, une veste tout de polyester, avec traitement déperlant, dotée de milliers de microbilles de verre qui réfléchissent la lumière. Les concepteurs affirment qu’elle serait détectable de nuit jusqu’à 300 mètres contre 50 pour un vêtement blanc traditionnel. L’apport d’empiècements fluorescents améliore également la visibilité de jour.

 Le fabricant de blouson de moto Raylier a préféré utiliser des leds pour améliorer la visibilité des motards, intégrés devant et derrière, au niveau du buste. Le pilote les actionne par une simple pression d’un bouton situé sur l’avant-bras et choisit de les allumer en continu ou de les faire clignoter. Ce blouson embarque également un capteur de décélération qui fera rapidement clignoter les leds en cas de freinage d’urgence.

Pour finir, évoquons également cette initiative d’une entreprise française de BTP qui, au premier abord, peut prêter à sourire. Cette dernière a conçu une silhouette humaine à taille réelle représentant un ouvrier. Découpée dans une plaque de PVC, elle est posée à proximité d’un chantier dont l’intention est de faire ralentir les automobilistes. Pour les psychanalystes, il s’agit de la parfaite illustration de l’approche cognitive. Les tests ont montré que la vue de la silhouette faisait ralentir les automobilistes avec plus d’efficacité que le traditionnel panneau « Attention chantier ». Comme quoi, dans le domaine de la sécurité routière, même les idées les plus simples ont leur place quand il s’agit de sauver des vies.

Cet article vous a plu ? Vous allez aimer les suivants !