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Les emballages en quête de plus de vertu
Souvent pointés du doigt, les emballages plastiques sont souvent plus vertueux qu’on ne le croit. Face au défi climatique, ils se réinventent. Passage en revue des innovations déjà en rayon.
Les emballages en quête de plus de vertu
Les emballages en quête de plus de vertu

Des emballages plastiques plus circulaires

Les emballages plastiques sont au cœur d’un véritable paradoxe. D’un côté, ils sont sans pareils pour conserver dans les meilleures conditions les aliments et les cosmétiques les plus sensibles, participant ainsi pleinement à la lutte contre le gaspillage.

De l’autre, ils sont pointés du doigt car jugés impactants pour la planète. Face à une telle ambivalence, ils se réinventent et se font plus verts pour réduire leur empreinte carbone.

L’enjeu est de taille, et les fabricants d’emballages collaborent activement depuis de nombreuses années déjà avec l’industrie des polymères pour trouver des solutions. Celles-ci passent par l’écoconception, le réemploi, l’incorporation de plastique recyclé – les trois piliers de la circularité – ainsi que par le développement de nouveaux matériaux.

 

L’empreinte environnementale de leurs produits et plus particulièrement de leurs emballages est désormais au cœur des préoccupations des industries de la cosmétique et de l’agroalimentaire..

Des qualités qui les placent au-dessus du panier…

Les emballages plastiques sont ainsi loin d’être condamnés. C’est d’autant plus vrai que l’analyse de leur cycle de vie montre qu’ils tiennent largement la comparaison avec les emballages conçus dans d’autres matériaux. Leur production émet souvent moins de CO2 que leurs alternatives (comme dans le cas de l’aluminium ou du verre, par exemple). Surtout, les polymères sont imbattables quand il s’agit de monter sur la balance. Dans le cas des bouteilles, par exemple, un modèle en verre pèse quinze fois plus lourd que son équivalent en PET. L’impact écologique est évident. Plus lourdes et plus encombrantes, les bouteilles en verre prennent plus de place et nécessitent plus de camions, et donc de carburant ou d’énergie pour le transport d’une quantité équivalente de liquide.

Enfin, la FAO (Organisation pour l’alimentation et l’agriculture) estime que 931 millions de tonnes, soit 17% des aliments produits en 2019, ont fini dans les poubelles des ménages, détaillants, restaurants, etc.

 

Les propriétés protectrices des polymères qui composent les emballages alimentaires permettent d’allonger la durée de conservation des produits qu’ils protègent. Chaque année, près d’un milliard de tonne d’aliments évite ainsi la poubelle !

En Europe, grâce aux emballages, seulement 3% de tous les produits livrés aux clients sont abîmés durant les phases de production et de transport. Les polymères restent aujourd’hui les meilleurs matériaux pour protéger efficacement ce qu’ils emballent grâce à leurs fonctions de barrière à l’oxygène, aux UV, à l’humidité et aux bactéries. Il est donc utile de rappeler que les polymères allongent la durée de vie des produits emballés tout en leur garantissant un mode de conservation idéal. Sont-ils si parfaits ? Pas encore mais ils sont sur la bonne voie.

L’écoconception, école de vertu

Que ce soit dans l’alimentaire ou la cosmétique, l’écoconception est devenue la règle pour les marques et les fabricants d’emballages (voir notre interview).
Dans ces deux secteurs, les produits à protéger sont très sensibles. Ils requièrent des contenants aux performances techniques élevées et qui respectent des normes sanitaires draconiennes.
A toutes ces équations s’ajoute celle de concevoir des emballages plastiques toujours plus recyclables et toujours plus verts. Certains grands noms, qui utilisent des volumes d’emballages considérables, se rapprochent de l’industrie des polymères pour concevoir des bouteilles, flacons, tubes et autres contenants, parfaitement dans l’air du temps des exigences environnementales.

Les emballages au régime minceur

Limiter l’impact environnemental des emballages, quel que soit le matériau, est désormais une priorité pour l’ensemble des fabricants dont le premier réflexe est en général de les mettre à la diète et de réduire la quantité de matière utilisée. Pour cela, les fabricants d’emballages plastiques utilisent des logiciels capables d’optimiser au plus juste la quantité de matière nécessaire à la bonne conservation d’un produit. Ainsi, en une vingtaine d’années, l’amélioration des procédés a permis le développement des emballages à parois fines. Grâce à des machines plus performantes, la masse des flacons de lessive en PEBD a été réduite de 13%, celle des bouteilles d’eau en PET de 40% et celle des pots de beurre en polypropylène voire en polystyrène de 22%.

 

Le principe de l’écorecharge a le vent en poupe ! Pour convaincre leurs clients, les fabricants n’hésitent pas à travailler leur design pour un résultat souvent très valorisant.

Mettre les produits eux-mêmes au régime minceur est aussi une bonne solution. L’élaboration de produits concentrés nécessite en effet beaucoup moins d’emballage. C’est la voie choisie par Cif, la marque de nettoyants domestiques d’Unilever, après qu’elle a admis que la majorité de ses produits étaient faits d’eau. Elle a conçu des recharges ultraconcentrées de Cif pour ses flacons vaporisateurs Power & Shine, qui nécessitent 75% de plastique en moins que les recharges dites « classiques ». Elles sont, en outre, entièrement recyclables.

 Evian se distingue de la même manière avec sa dernière innovation : Evian® (re)new. Elle se présente sous la forme d’une bulle rétractable de 5 litres, posée sur une fontaine au design contemporain. Fabriquée en plastique 100% recyclé, cette bulle, fine et légère, prend une nouvelle forme après chaque utilisation. Elle utilise 60 % de plastique en moins en comparaison, par litre d’eau, à une bouteille Evian® de 1,5 l (une bulle de 5 l équivaut à 3,33 bouteilles Evian® de 1,5 l).

 

 

Les monomatériaux gagnent en polyvalence

Autre axe majeur de recherche et d’amélioration : concevoir des emballages efficaces à partir d’un unique polymère. Le défi est de taille mais, à la clé, il permet des emballages plus facilement recyclables. Aujourd’hui, en moyenne, 70% des emballages plastiques sont constitués d’une seule résine.

Le cas de certains sachets ou pochons alimentaires, destinés à la conservation des produits humides, est emblématique. Ils sont composés de plusieurs polymères différents (majoritairement du PE et du PET). Les caractéristiques techniques de chacun contribuent aux performances exigées de l’ensemble. Les denrées qu’ils doivent protéger sont particulièrement sensibles à l’oxygène, aux bactéries et/ou aux UV. Il convient dès lors d’empiler des films polymères de nature différente et aux fonctions bien distinctes. S’ils sont d’une efficacité sans pareille, ces emballages restent très difficiles à recycler avec les procédés de recyclage mécanique actuels. Or, d’ici 2030, en Europe, tous les emballages en plastique devront être recyclables. Les industriels de la confiserie, par exemple, ont revu leur copie pour arriver à se dégager du « multicouches multimatières » tout en garantissant une parfaite conservation de leurs produits.

Pour cela, ils ont misé sur les caractéristiques des films en polyéthylène qui peuvent avoir des propriétés différentes selon l’orientation de leur trame. Ainsi, certains de ces films ont des propriétés mécaniques renforcées grâce à un procédé d’étirage directionnel qui oriente leur structure polymérique. Il est aussi possible d’ajouter des additifs à certaines couches de films pour leur conférer des propriétés spécifiques. Aujourd’hui, on peut trouver dans les rayons des supermarchés des pochons multicouches 100% polyéthylène. Mars, Nestlé ou Haribo les utilisent désormais pour une partie de leurs confiseries. Arrivés en fin de vie, ces emballages deviendront, une fois recyclés, des bâches d’agriculture ou des sacs poubelles.

 

Des marques comme Haribo proposent désormais des pochons multicouches 100% polyéthylène.

Dans le même ordre d’idée, Nestlé a développé pour sa marque Gerber – des compotes pour enfants – des poches composées exclusivement de polypropylène, qui remplacent les poches en multicouches multimatériaux jusqu’alors utilisées. L’objectif de la marque est de parvenir à les recycler en produits similaires.

Albea, l’un des leaders mondiaux des emballages cosmétiques, vient de mettre sur le marché l’EcoFusion Top, un tube dont le corps et le bouchon ne font plus qu’un. Cette solution a permis une réduction de poids de plus de 80% par rapport aux solutions standard. Il s’agirait du tube le plus léger du marché ! Et pour parfaire sa création, Albea l’a totalement conçu à partir d’un unique polymère (le polyéthylène haute densité – PEHD) afin d’en faciliter la recyclabilité.

 

Faire le choix d’un monomatériau, c’est garantir une meilleure « recyclabilité » des produits. Pour aller encore plus loin, certains fabricants comme Albea ont réussi à concevoir un tube monomatériau constitué d’une seule pièce. Une vancée pour le consommateur qui n’a plus de question à se poser quant au choix du bac de recyclage ...

Emballages rechargeables… tout pour emballer les consommateurs

Le principe est simple : le consommateur achète son produit, qui se compose d’un étui, supportant tout le design, et d’une cartouche contenant la crème, le fluide voire le bâton de rouge à lèvres… Une fois ce produit utilisé, il lui suffit de ne racheter qu’une recharge ou une cartouche. Un peu à l’image d’un stylo-plume… Toute l’astuce repose sur leur facilité d’utilisation. Les designers s’en donnent à cœur joie et font bien souvent preuve d’une imagination débridée, car il convient avant tout de  convaincre et de séduire l’utilisateur. Asquan, une marque hongkongaise, propose ainsi l’Essential Push Button Tottle. Si l’étui est assez classique, la recharge en polypropylène ressemble à un accordéon. Après son installation, il suffit d’appuyer sur un petit bouton pressoir placé à l’extrémité de l’étui pour faire sortir la crème. Une fois vide, la recharge se recycle comme un emballage traditionnel monomatière, mécaniquement ou chimiquement. Son faible coût est un autre avantage pour le consommateur. En effet, contrairement aux autres produits, celui-ci n’achète qu’une seule fois l’étui, qui est très souvent designé et réalisé dans un polymère plus noble, comme l’ABS, un plastique brillant pouvant prendre un aspect métallique et très résistant aux impacts. La recharge, quant à elle, n’a pas besoin d’être belle puisqu’elle est invisible ; elle doit seulement être pratique et résistante, ce que permet le polyéthylène ou encore le polypropylène.

D’autres, comme le fabricant d’emballages espagnol Faca Packaging, proposent des étuis en polymères recyclés, un PMMA en l’occurrence. Plus transparent que le verre, pouvant prendre des aspects ultrabrillants, opaques voire colorés, le PMMA est l’un des polymères préférés des designers.

 

Le principe de l’emballage rechargeable est de plus en plus adopté par les professionnels de la cosmétique. Ainsi, seuls les étuis sont pérennes, ce n’est donc pas un frein au design des emballages si important dans ce domaine pour rendre le produit attrayant..

L’industriel espagnol a choisi de s’intéresser à deux types de PMMA recyclé. Le premier est issu du recyclage chimique, le second provient de pièces de PMMA en fin de vie ou de chutes de production, qui sont ensuite fondues avant d’être remoulées. Cette dernière technique ne pose aucun problème de sécurité sanitaire, puisque l’étui n’est pas en contact avec le produit. Seule la cartouche l’est…

Ecorecharges en monomatière : le fin du fin

Réduction des plastiques utilisés, utilisation accrue de monomatériaux, recyclabilité facilitée, etc., le marché des écorecharges progresse. Certains fabricants cherchent à les concevoir de plus en plus à partir d’un seul polymère pour en faciliter le recyclage.

 

L ‘écorecharge est une excellente solution pour réduire la quantité de plastiques utilisée dans les emballages. Voire, elle devient parfaite lorsqu’elle n’est constituée que d’un seul polymère. Ce qui est de plus en plus le cas.

Dernièrement, l’américain Arcade Beauty, leader mondial des solutions d’échantillons et monodoses pour le parfum et la beauté, a développé pour L’Oréal sa première écorecharge monomatière en polyéthylène (PE), bouchon compris. Il s’agit d’une parfaite alternative au flacon, qui permet une économie de matière de 75% par rapport à deux flacons de shampoing de 250 ml. L’écorecharge est en effet l’une des nouvelles pistes explorées par les professionnels de l’emballage, et elle a tous les atouts pour monter en puissance rapidement.

 Sur sa lancée, ce dernier a aussi conçu pour Kérastase, la marque des soins capillaires professionnels de luxe, une écorecharge de 500 ml entièrement en polyéthylène et recyclable. Elle promet une économie de 82% de plastique par rapport aux flacons classiques.
Le secteur de la lessive n’est pas en reste : un exemple parmi tant d’autres, les recharges Frosch (Rainett en France) ont adopté un nouveau packaging, qui consiste en un sachet souple et un bouchon, tous deux conçus en polyéthylène, qui pourront, un jour, être recyclés. Les parties imprimées se détachent facilement du sachet afin là encore de faciliter le futur recyclage.

Des plastiques moins accros aux hydrocarbures

S’affranchir des hydrocarbures pour fabriquer des matières plastiques est une autre voie pour rendre celles-ci plus vertes. On parle alors de décarbonation. Cela se traduit concrètement par l’utilisation de matières premières issues de la biomasse végétale (amidon de maïs, ricin, canne à sucre, algues, déchets forestiers, etc.) ou animale (graisses). Les polymères ainsi produits sont désignés comme bioplastiques, un terme qui peut prêter à confusion. Contrairement aux idées reçues, un bioplastique n’est pas pour autant toujours biodégradable ou compostable.
(Pour en savoir plus, voir notre dossier.)

La production, à partir d’un végétal, d’un polymère traditionnellement issu du pétrole, comme le polyéthylène par exemple, est une piste déjà éprouvée et promise à un bel avenir. Le principal avantage de ces matériaux est qu’ils sont issus de matières renouvelables. De plus, la ressource végétale utilisée absorbe le dioxyde de carbone de l’atmosphère et le séquestre le temps de la durée de vie du produit, réduisant l’impact carbone de l’emballage. Ces polymères biosourcés sont exactement les mêmes que leurs homologues fossiles, ils présentent les mêmes propriétés et, surtout, peuvent intégrer les mêmes filières de recyclage déjà existantes.
Il y a tout juste un an, le géant suisse Nestlé lançait en Belgique un nouveau couvercle en polyéthylène pour les emballages d’une gamme de produits nutritionnels de sa marque destinés aux nourrissons et aux enfants. Sa particularité : le polyéthylène est issu à 66% de la canne à sucre. Les couvercles sont donc certifiés comme produits à base de matière d’origine renouvelable. Ils peuvent être recyclés via la filière classique du PE (polyéthylène).


Un polyéthylène 100% made in CO2

Si la voie des bioplastiques et des matières recyclées représente une solution intéressante pour s’affranchir des hydrocarbures, elle est loin d'être la plus ambitieuse. Dernièrement, le pétrolier Total, le groupe L’Oréal et l’américain LanzaTech, leader mondial de la fermentation de gaz, spécialisé dans le recyclage du carbone, ont annoncé avoir réussi à produire conjointement un flacon cosmétique en polyéthylène fabriqué à partir d’émissions industrielles de carbone, captées et recyclées. Une première mondiale ! Le procédé testé avec succès se décompose en trois étapes : LanzaTech capte les émissions industrielles de carbone en sortie d’usine et les convertit en éthanol grâce à un processus biologique qu’il a mis au point. Total transforme l’éthanol en éthylène via un procédé de déshydratation innovant. Ce gaz est ensuite polymérisé en polyéthylène qui présente toutes les spécificités techniques de son équivalent fossile. L’Oréal, enfin, utilise ce polyéthylène pour fabriquer des emballages aux propriétés en tout point équivalentes à celle d’un polyéthylène conventionnel. Cette indéniable réussite technologique et industrielle démontre que des emballages plastiques peuvent être produits à partir d’émissions de carbone. Cette première mondiale représente un autre axe de décarbonation des matières plastiques.

 

Fabriquer des plastiques à partir du co2 capté en sortie de cheminée postindustrielles est une des prouesses réalisées par un consortium de trois industriels majeurs.

 

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