Techno du futur 4 min
Ces polymères qui impressionnent
Les imprimantes 3D nous font-elles vivre une nouvelle révolution industrielle comme certains l’affirment ? C’est fort probable et même si pour le moment elle ne concerne que très peu les particuliers, les industriels en profitent déjà pleinement.
Ces polymères qui impressionnent
Ces polymères qui impressionnent

Un bouleversement multisectoriel

 

Parler de véritable révolution industrielle lorsque l’on évoque l’impression 3D peut surprendre. Ce serait oublier qu’elle a d’ores et déjà trouvé sa place au sein des plus grands groupes industriels. Il est désormais possible d’imprimer des pièces de grandes tailles, chose inconcevable il y a encore quelques années… Economiquement, l’impression 3D est source de toutes les espérances. Certains annoncent même que le bouleversement sera plus grand que l’internet.

Houston, on a un problème

Que faire lorsque le manche de votre clé à douille rend l’âme ? Ici, il suffit de se rendre dans le magasin de bricolage le plus proche. Mais la chose se complique lorsque vous êtes en orbite, à quelque 400 km de la terre. Compliqué de faire un aller-retour… Heureusement, la NASA s’intéresse maintenant depuis longtemps aux imprimantes 3D, à tel point qu’elle en équipe la station internationale (ISS). Il ne lui aura fallu que quelques minutes pour modéliser depuis la terre cette clé à douille et envoyer le fichier dans l’espace comme un simple email. Ne restait alors aux astronautes qu’à imprimer en 3D la clé, et le tour était joué. Certes, l’exploit reste modeste par rapport au premier pas sur la Lune, mais ce 21 décembre 2014 restera dans les annales de la NASA comme étant la première fois qu’un objet était conçu sur terre avant d’être construit dans l’espace.

Ce n’est en rien anecdotique, car grâce à ce procédé, des milliers de dollars devraient être économisés à terme puisque l’on n’embarquera que le minimum vital. A près de 22 000 € le kg envoyé dans l’espace, le calcul est vite fait.

 

La future fusée Ariane 6, qui devrait prendre son envol dès 2020, comptera aussi de nombreuses pièces imprimées. Dans l’aérospatial, où les pièces sont généralement fabriquées en très petite série, l’imprimante 3D a un net avantage économique. La qualité d’impression est désormais d’un tel niveau qu’il est tout à fait envisageable de créer des pièces grâce à ce procédé notamment pour les objets complexes et d’une taille inférieure à 40 cm. Ariane 6, dont le coût de production, à priori moitié moins cher que celui d’Ariane 5, devrait largement mettre à contribution l’impression 3D pour gagner son pari. Ainsi, les injecteurs des moteurs sont désormais imprimés. Une technique qui a permis de raccourcir les délais de fabrication mais surtout d’en réduire la complexité, puisque de 270 pièces nécessaires à la fabrication d’un injecteur, on est passé à 3…

Impressionnant baptême de l'air

Ce n’est encore qu’un drone, mais il mesure 4 mètres d’envergure pour seulement une bonne vingtaine de kilos. Il s’agit surtout du tout premier avion imprimé. Réalisé entièrement en polyamide, à l’exclusion des éléments électriques, cet appareil a suscité toute la curiosité lors de sa présentation au dernier Salon aéronautique de Berlin. Baptisé Thor et conçu par Airbus, le drone a rempli sa mission en volant parfaitement lors des nombreuses démonstrations auxquelles il participait. Sa production en série n’est pas encore envisagée, car pour Airbus, il s’agissait avant tout de tester en réel ce qu’il est possible de faire avec l’impression 3D. Même si les grands avionneurs tels qu’Airbus et Boeing explorent déjà depuis longtemps la technologie de l’impression 3D en concevant des pièces isolées notamment pour l’A350 ou le 787 Dreamliner, Thor est une vraie première puisque jamais un avion n’était intégralement sorti d’une imprimante.

Essai transformé donc, et Airbus fait la preuve du sérieux de la technologie qui permet un gain de poids considérable et ne nécessite pas un outillage spécifique. Enfin, l'impression en trois dimensions réduit à presque rien les déchets de fabrication, puisqu'il ne s'agit plus de tailler une pièce dans un bloc brut de matière mais de la créer en déposant la matière choisie couche par couche selon le modèle préalablement créé sur ordinateur.

Le secteur médical opère sa transformation

La santé reste certainement l’un des marchés les plus prometteurs pour les concepteurs d’imprimantes 3D, et notamment dans le domaine des dispositifs médicaux. Peu le savent, mais les prothèses auditives haut de gamme sont aujourd’hui toutes fabriquées par impression 3D pour s’adapter parfaitement au pavillon auriculaire de leur porteur. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres, comme en témoignent les nombreuses publications scientifiques qui se succèdent jour après jour. Jusqu’à hier, pour remplacer un os abîmé, à cause d’un cancer par exemple, il fallait en « tailler » un nouveau en titane. Aujourd’hui l’imagerie médicale associée à une imprimante 3D permet la création de véritables prothèses sur mesure qui répliquent impeccablement la partie de l’os à remplacer.

Si l’impression en titane reste encore majoritaire, les polymères sont désormais de plus en plus présents, comme le PEEK qui associé à de la céramique fait des miracles pour reconstruire un os abîmé. Le PMMA n’est pas en reste puisque, en 2014, une partie de crâne imprimée en Plexiglas a été implantée chez un patient dont les os s'épaississaient au point de comprimer le cerveau.

Les polymères se font joueurs

Les médecins les adorent ! Le corps humain étant d’une grande complexité, les chirurgiens disposent parfois de très peu de visibilité lorsqu’ils « ouvrent » un patient. Et comment s’entraîner pour réaliser le geste parfait qui sauvera la vie ? Des sociétés spécialisées mettent au point depuis maintenant quelques années des serious games, des modélisations du corps humain sur lesquelles les chirurgiens s’entraînent sans risquer de blesser qui que ce soit. Jusqu’alors, ces jeux étaient le plus souvent développés sur la base de programmes informatiques. Le chirurgien manipulait alors virtuellement son scalpel et son speculum… Encore une fois, les énormes progrès de l’imagerie médicale permettent désormais de réaliser, via une imprimante 3D, une copie parfaite de l’organe à opérer.

L’entreprise japonaise Fasotec s'est engouffrée dans cette voie et propose depuis seulement quelques mois des poumons, vessies ou autres organes étonnants de réalisme imprimés avec un polymère mou à la structure proche du silicone. Ils sont même gorgés d’un liquide pour reproduire le sang et « agrémentés », le cas échéant, de tumeurs.

Encore de la route pour l'automobile

Les imprimantes 3D connaissent également un important succès dans l’industrie automobile. Même si aujourd’hui aucune imprimante ne peut répondre aux cadences élevées réclamées par le secteur, celles-ci ont tout de même trouvé leur place dans les bureaux d’études, que ce soit pour le design, le prototypage de préséries, voire les prototypes de pièces de rechange. Pouvoir réellement personnaliser son véhicule autrement que par l’ajout de stickers n’est pas encore pour demain, cependant, les constructeurs de voitures très haut de gamme réfléchissent à la personnalisation des tableaux de bord pour les modèles les plus exclusifs.

En attendant, de nombreuses entreprises dans le monde se sont lancées pour défi de concevoir un véhicule entièrement fabriqué à partir d’imprimantes 3D. Certes, ce ne sont encore que des prototypes, voire des exercices de style, mais de nombreux projets sont déjà sortis des cartons. Ainsi, en 2014, l’américain Local Motors créait le buzz en présentant un premier véhicule entièrement construit avec cette technique. Après avoir été conçues sur un outil de CAO (Conception assistée par ordinateur), les pièces principales ont été fabriquées par une imposante machine qui a déposé 212 couches de plastique renforcé de carbone (CFRP). La quarantaine de pièces ainsi produites remplace quelque 2 000 éléments d’une voiture traditionnelle ! Après ce pari gagné, l’entreprise tente actuellement de mettre au point un véritable véhicule tout-terrain capable de s’engager sur différentes courses internationales.

La révolution est bel et bien engagée, même si beaucoup d’obstacles restent à franchir : temps d’impression, production en grande série… Cependant, comme pour toutes les nouvelles technologies, les progrès sont très rapides et se mesurent quasiment d’un mois sur l’autre. Actuellement, c’est le secteur du bâtiment qui s’intéresse de très près aux techniques d’impression 3D. Ainsi, de par le monde, de nombreuses start-up relèvent le défi et proposent déjà des prototypes grandeur nature de bâtiments entièrement fabriqués par impression 3D.

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