Techno du futur 3 min
La piézoélectricité donne une nouvelle impulsion aux plastiques
Vibrations, sons, mesure de pression ou de températures… Grâce aux polymères électroactifs, les produits connectés seront doués de nouvelles fonctions sensorielles… Et autonomes en énergie.
La piézoélectricité donne une nouvelle impulsion aux plastiques
La piézoélectricité donne une nouvelle impulsion aux plastiques

Les polymères électroactifs, matériaux à fort potentiel

Les plastiques montent en charge

La piézoélectricité est la capacité de certains matériaux, à se déformer sous l’action d’un champ électrique ou, inversement, à générer du courant sous l’effet d’une contrainte mécanique. 
Jusqu’à présent, cette propriété a plutôt été mise à profit par l’industrie micro-électronique pour la conception de «capteurs», comme les détecteurs de mouvements, qui envoient un signal électrique quand on les touche ou, à l’inverse, dans des actionneurs dont certaines pièces se déforment sous l’effet d’une tension électrique.
Après avoir longtemps privilégié les céramiques ou les alliages spéciaux pour ses applications, les industriels s’intéressent désormais de plus en plus à la troisième catégorie de matériaux  piézoélectriques, celle des polymères dits électroactifs parmi lesquels les polymères fluorés semblent les plus prometteurs en raison de leurs propriétés électromécaniques et imprimables.

Le PVDF a la fibre sensible

En 1969, le professeur Kawai, met en évidence la forte activité piézoélectrique dans le polyvinylidène fluoride (PVDF) étiré après l’extrusion. C’est seulement une quinzaine d’années plus tard que ce polymère fluoré apprécié pour sa résistance aux chocs, aux ultraviolets et à l’abrasion, est utilisé dans des capteurs, sous forme de films métallisés ou de câbles.
L’une de ses applications courantes est alors la pesée de véhicules grâce à un câble en PVDF intégré dans le revêtement routier. Le plastique délivre une impulsion proportionnelle au poids de chaque essieu et permet ainsi de déterminer la masse transportée.

 

Avec les copolymères électroactifs dérivés du PVDF, on change d’échelle. Ils permettent en effet de réaliser des capteurs sensibles à des vibrations ou des pressions comparables à celles d’un papillon. Avec les nano-fibres de PVDF obtenues grâce au procédé d’électro-filature mis au point dans le cadre du projet européen Nano-jet, on peut désormais réaliser des tissus capables de mesurer la température, la pression artérielle ou le stress. Autant de signaux qui permettent de surveiller, par exemple, l’état d’un malade depuis son lit, la somnolence d’un conducteur, depuis son siège… 
L’exceptionnelle sensibilité de cette fibre ouvre même la voie à la conception d’une peau artificielle aux propriétés proches de la peau humaine

Les plastiques battent le pavé pour produire l'électricité

Autre voie prometteuse pour les polymères électroactifs, « l’energy harvesting » consiste à convertir de petites quantités d’énergie mécanique en électricité afin d’alimenter des systèmes électroniques mobiles et d’en accroitre l’autonomie. 
Ces plastiques souples, peu chers, facilement modelables et souvent biocompatibles présentent nombre d’avantages pour la récupération d'énergie. La multiplication de micro-capteurs permet de compenser la faible tension piézoélectrique générée ponctuellement. 
L’amplitude des déformations liée à l’élasticité des polymères est également un atout. En 2015, la firme japonaise Ricoh a annoncé la commercialisation d’un film élastomère générateur d’électricité. Plus souple que les dérivés du PVDF, ce matériau offrirait un rendement piézoélectrique équivalant aux céramiques… Deux atouts considérables pour s’imposer sur le marché des objets connectés.

Les polymères électroactifs ont également fait leur preuve, à plus grande échelle, sur les « dance-floor » générateurs d’électricité de discothèques branchées. Le procédé a été décliné, par la start-up anglaise Pavegen, avec des pavés piézoélectriques à base d’élastomère recyclé installés sur les trottoirs, dans les stades ou les centres commerciaux.

 

 

Quand les plastiques roulent des mécaniques

Des ingénieurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont développé un générateur piézoélectrique autonome à partir d’une membrane multicouche qui se déforme au contact de la vapeur d’eau. 
La première couche composée de deux polymères, une matrice souple de polypyrrole et un gel de polyol-borate, se rétracte fortement en absorbant l’humidité avant de reprendre sa surface d’origine après évaporation. Le potentiel de ce phénomène est loin d’être négligeable car, en présence d’humidité, le cycle des déformations est continu et les forces déployées dix fois supérieures au poids de la membrane. 
Forts de ce constat, les chercheurs sont parvenus à générer un courant alternatif en la couplant avec un film piézoélectrique. Ils prévoient d’ores et déjà de nombreuses applications :

outre les capteurs d’humidité, ils envisagent d’intégrer ce matériau dans des vêtements, afin d’utiliser la sueur pour produire de l’électricité… Voire dans des toiles de grande envergure installées au-dessus des lacs ou des rivières.

Les capteurs piézos donnent le tempo

Les polymères électroactifs ne servent pas seulement à signaler la présence d’intrus ou l’imminence d’une catastrophe. Leur capacité à convertir les vibrations en électricité est mise à profit, de façon bien plus agréable, par les musiciens… Et pour leurs auditeurs. 
Les membranes plastiques entrent en effet dans la composition de nombreux capteurs « piézo » installés sur les instruments à cordes, les percussions ou dans certains microphones. Leur rôle : convertir les ondes acoustiques en signaux électriques qui, une fois amplifiés, sont diffusés par des enceintes ou enregistrés sous forme magnétique ou numérique. 
A l’inverse, c’est grâce à ce type de capteurs que les émules de Ringo Starr et de Phil Collins, peuvent travailler leur grip sur une batterie électronique ou un multi pads sans fâcher les voisins.

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