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Franchir les barrières de l’impossible

Une fatalité, le handicap ? Non, pour certains, c’est même un prétexte pour aller encore plus loin en s’essayant à des disciplines, généralement sportives, normalement dédiées aux seules personnes valides.
Franchir les barrières de l’impossible
Franchir les barrières de l’impossible

On se souvient de ce nageur amputé des quatre membres qui s’était lancé comme défi de relier les cinq continents à la nage. Mais sans un matériel tout spécialement adapté et bien entendu sans un entraînement rigoureusement encadré par des professionnels, l’exploit n’aurait pu avoir lieu. Là encore l’innovation est à la hauteur de la performance et des audaces, et est souvent indissociable des matériaux composites.

Un siège pour retrouver les joies de la glisse

C’est de saison… Le ski a longtemps été impossible à pratiquer pour les personnes paraplégiques ou amputées des membres inférieurs. Et pour cause, cette discipline ne repose que sur l’appui des jambes sur les skis. Pourtant depuis quelques années des fabricants ont réussi à le mettre en leur portée. Le ski, qui a fait son entrée aux Jeux paralympiques en 2002, est même une discipline en plein essor en raison de l’évolution du matériel qui autorise une pratique à la fois performante et accessible à un nombre toujours croissant d’individus. Pour dévaler les pistes, le skieur s’assoit dans un siège fixé à un système d’articulation, lui-même relié aux skis. En fait, ce siège joue le rôle traditionnel des chaussures. Et c’est en faisant basculer son bassin que le skieur réussira à enchaîner les virages. Selon le niveau du skieur, le siège sera plus ou moins hi-tech :

les modèles d’entrée de gamme sont conçus à partir d’une fibre de verre enduite de gelcoat, les modèles de compétition sont eux en résine époxy et fibre de carbone ou de kevlar. Pour garantir le confort, l’intérieur des baquets est garni d’une mousse de polyuréthane plus connue sous son appellation commerciale de Bultex©. Certains peuvent avoir une couche de mousse supplémentaire, elle aussi à base de polyuréthane, dite à mémoire de forme : on parle alors de mousse viscoélastique et thermosensible.

 

Tout est question d'équilibre

L’idée est venue d’un surfeur. Victime d’une attaque de requin et désormais amputé au-dessus du genou, il ne pouvait se résoudre à abandonner sa passion. Muni d’une prothèse de marche, il tente l’expérience, mais il lui est impossible de trouver l’équilibre indispensable à la pratique du surf. Or, chez les personnes valides, cet équilibre repose notamment sur la proprioception des membres inférieurs. Plus simplement dit la perception qu’on a de soi-même dans un espace donné. En effet, le cerveau adapte automatiquement la position des jambes en fonction de l’inclinaison et de la gravité. Restituer sur une prothèse les capacités de flexion du genou de telle façon que celles-ci permettent de retrouver ce fragile équilibre n’est donc pas une mince affaire. Le défi a été relevé par la société Proteor Handicap Technologie qui a conçu un genou prothétique compatible avec la pratique d’activités extrêmes.

Il associe l’action d’une articulation de dernière génération avec celle de tendons en élastomère qui imitent l’action des muscles. Depuis, cette prothèse est utilisée pour un grand nombre de sports extrêmes, comme le ski, le snowboard, le VTT ou encore la planche à voile. Pour cela, il suffit de régler l’amortisseur et de changer les tendons en fonction de la puissance requise.

Les polymères mettent les voiles

La voile est aussi désormais accessible aux personnes handicapées. Si les coques restent traditionnellement en polyester, les cockpits sont désormais parfaitement adaptés aux différents handicaps. Sans la grande facilité de moulage des polymères, la voile serait restée un domaine interdit d’accès à bien des handicapés, notamment aux paraplégiques. Il est ainsi désormais possible d’entrer dans son bateau sans quitter son fauteuil roulant. Ce dernier vient naturellement se caler dans un espace dédié à cet effet. Sur d’autres modèles, c’est carrément un siège central moulé, lui aussi dans du polyester, qui a été spécialement conçu pour recevoir un skipper paraplégique. L’air de rien, mettre au point de telles embarcations n’est pas une tâche facile, car il n’est pas question de prendre une coque et de l’adapter.

Ces voiliers font l’objet d’une étude particulière : toute la difficulté est d’en abaisser au maximum le centre de gravité sans pour autant surcharger les parties les plus basses. La densité des matériaux utilisés est donc primordiale. Heureusement, le catalogue des polymères est assez large ! A contrario et toujours pour une question d’équilibre, le haut du voilier doit être le plus léger possible. C’est pourquoi, les voiliers les plus performants ont des mâts en fibre de carbone, un matériau moins lourd que l’aluminium. Quant aux voiles, et pour la même raison, elles sont souvent composées d’un monofilm de polyester transparent renforcé par de la fibre de mylar sur les points d’effort.

 

Et parce que la voile se pratique aussi sur terre ou en tout cas sur les plages, un jeune Néo-Zélandais a créé un char à voile parfaitement accessible à tous. Particulièrement compact une fois plié, il se monte en cinq minutes et ne pèse que 29 kg. Si le châssis reste en aluminium, tout le reste est à base de polymères. L’élément le plus notable est l’assise en toile de polyester, un matériau particulièrement résistant notamment à l’abrasion provoquée par le sable. Quant au harnais, à l’instar des ceintures de sécurité qui équipent nos véhicules, il est lui aussi en polyester, un matériau décidément très en vogue dans les sports nautiques…

Des plastiques pour homme bionique

Nous n’avons cité ici que les avancées les plus spectaculaires, mais bien d’autres existent… Les mentalités changent en même temps que les regards. Aujourd’hui, les handicapés ne veulent plus se résoudre à subir leur vie. Pour certains, relever des défis, c’est montrer qu’ils peuvent mener la même existence que les personnes valides. En cherchant à mettre au point l’outil capable de leur faire vivre leur passion, voire de se livrer à l’exploit, de nombreuses innovations techniques et technologiques sont nées de leurs seuls cerveaux. C’est bien souvent en se tournant vers la très large palette des polymères que les solutions ont été trouvées. Et ce n’est qu’un début, car ces matériaux progressent aussi vite que l’électronique. Quel amputé de la main aurait imaginé, il y a à peine une décennie, retrouver le sens du toucher grâce à une main bionique ? L’homme qui valait 3 milliards n’est plus un mythe.

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