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Emballages plastique : pourquoi tant de haine ?
Pour certains, les emballages sont encore perçus comme de simples supports publicitaires, voire seulement comme des déchets. Une mauvaise réputation largement injustifiée, notamment pour les emballages primaires qui ont des vertus encore hélas bien trop mésestimées.
Emballages plastique : pourquoi tant de haine ?
Emballages plastique : pourquoi tant de haine ?

Economie circulaire : les plastiques font aussi un carton

Au cœur des préoccupations environnementalistes actuelles, l’emballage plastique n’a pourtant rien de nouveau, puisque les fabricants de peinture les utilisent dès les années 1950 sous la forme de tubes. Il faudra attendre une décennie pour voir arriver les premières bouteilles en plastiques. D’abord en PVC, puis, à partir des années 1990, en PET (polytéréphtalate d’éthylène). Celles-ci allaient révolutionner l’industrie agroalimentaire, et plus particulièrement le transport et le mode de conservation des boissons. D’un poids jusqu’à dix fois inférieur à celui du verre, leur transport se voit facilité et moins polluant. Une décennie plus tard, c’est l’invention du flacon à pompe qui, à son tour, révolutionnera l’univers de la cosmétique et de la parfumerie. Les années 2000 verront, en outre, l’apparition des premiers polymères compostables. Depuis, la recherche se poursuit et, tous les ans, les fabricants d’emballages présentent des innovations majeures qui prennent de mieux en mieux en compte les impératifs écologiques et de développement durable.

Plastiques vous êtes, plastiques vous redeviendrez

En 2018, la Coca-Cola Company annonçait fièrement avoir investi chez Ioniqa, une société néerlandaise détentrice de brevets innovants portant sur des processus de recyclage du PET difficile à recycler (le plus souvent du PET coloré). Décidemment sur tous les fronts, Coca-Cola (mais aussi Pepsico) avait signé quelques mois plus tôt un accord pluriannuel avec le canadien Loop Industries, entreprise spécialisée dans le recyclage chimique du plastique, en vue de s’approvisionner en rPET (pour PET recyclé). L’objectif était de parvenir à fabriquer des emballages de qualité supérieure et aptes au contact alimentaire contenant au minimum 50% de résine recyclée d’ici les prochaines années. Où est le tour de force alors qu’il existe déjà des flacons composés à 100% de rPET ? C’est simple, ces bouteilles sont jusqu’à présent destinées aux produits non alimentaires comme celles développées par la marque de produits d’entretien biologiques Rainett. Le défi des fabricants de boissons est de parvenir à produire des bouteilles parfaitement adaptées aux exigences de sécurité alimentaire.

 

A l’instar du PET, de nombreux polymères se recyclent assez facilement. D’ici peu, les emballages alimentaires 100% issus de plastiques recyclés devraient faire leur apparition dans les rayons des supermarchés.

Si le PET est souvent mis en avant, c’est surtout parce qu’il se recycle correctement depuis de nombreuses années et qu’il existe des procédés de recyclage permettant de produire un PET recyclé exempt de tout contaminant. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA en anglais) a d’ailleurs émis un avis positif aux centres de recyclage qui respectent toutes les règles en vigueur pour que le rPET puisse être utilisé dans les emballages alimentaires. Ainsi, les grands embouteilleurs de boissons que sont Nestlé et Danone utilisent déjà près de 25% de rPET pour certaines de leurs bouteilles. Danone estime même être aujourd’hui capable de fabriquer des bouteilles 100% en rPET mais considère qu’il y a encore des progrès esthétiques à faire pour les rendre moins grises et moins opaques. La marque espère atteindre son objectif de 100% rPET d’ici 2025.

Enfin, il est important de signaler que le PET ne sert pas uniquement à fabriquer des bouteilles. De nombreuses barquettes alimentaires en sont également issues. Et comme il se doit, ici aussi le rPET a sa place.

Cela dit, le PET n’est pas le seul polymère destiné à l’emballage qui se recycle. L’autre star des recycleurs est le PEHD, mieux connu sous son appellation scientifique de polyéthylène haute densité. Un polymère fréquemment utilisé par les fabricants de bidons destinés à recevoir des produits d’entretien de la maison ou encore par les professionnels de la cosmétique. Dans ce domaine également de gros efforts sont faits pour utiliser du PEHD recyclé. Gros fournisseur de bidons et autres flacons, notamment pour les industries cosmétiques et de produits d’entretien, l’autrichien Alpla propose aujourd’hui une large gamme de produits contenant du PEHD recyclé.

Avancées technologiques, petites astuces : les polymères passent au vert

Si la majeure partie des emballages plastique principalement constitués d’un seul polymère peuvent être recyclés, les choses se compliquent lorsque les emballages sont constitués de multiples couches de différents polymères. C’est le cas des sachets alimentaires contenant souvent des produits humides ou semi-secs fortement sensibles aux agressions extérieures, notamment l’oxygène.

Les procédés habituels de recyclage mécanique nécessitent en effet la plupart du temps de séparer les différents polymères. Des techniques existent mais elles demeurent onéreuses.

Les fabricants de sachets en ont bien conscience, et la plupart n’ont pas attendu la pression des consommateurs pour chercher de nouvelles solutions en explorant les voies de l’écoconception. C’est notamment le cas de l’israélien Polysack, qui a réussi à mettre au point un nouveau type de sachets multicouches mais monomatière, donc… facilement recyclables. Ses sachets sont conçus à partir de différents films constitués de polymères appartenant à la même famille, celle des polyoléfines, compatibles pour leur recyclage. Sans toucher à la nature du polymère, Polysack a développé une machine qui superpose et colle les différentes couches en jouant uniquement sur l’orientation de chacune d’entre elles. Le résultat est à la hauteur des attentes, puisque ces nouveaux sachets garantissent les mêmes qualités de conservation que les sachets issus d’un assemblage de PET ou de polyéthylène par exemple. 

D’autres projets fleurissent un peu partout et montrent bien que nombreux sont ceux qui cherchent à faire des efforts pour donner une nouvelle image des polymères. Parfois, il ne s’agit que de petites astuces, comme ces bouchons qui restent solidaires de la bouteille, évitant leur perte dans l’environnement tout en ayant les mêmes aptitudes de recyclage.

© Power Gel

Parfois, une simple astuce suffit à rendre un emballage ecofriendly. La marque Power Gel a conçu une languette d’ouverture qui reste accrochée à l’emballage après ouverture. L’astuce a consisté à renforcer la base de cette languette par un polymère indéchirable….

 

 

Dans le même ordre d’idées, la marque de produits énergétiques Power Gel a conçu une gourde munie d’une languette d’ouverture qui, une fois déchirée, reste accrochée à l’emballage. C’est un petit détail mais combien de fois avons-nous vu marathoniens ou coureurs cyclistes recracher dans la nature cette languette après l’avoir déchiquetée avec leurs dents ? C’est toujours ça de moins qui finira au bord des routes, car la taille de cette languette fait qu’elle passe totalement inaperçue lors des opérations de nettoyage.

 

Les emballages cosmétiques font peau neuve

La cosmétologie n’est pas en reste. L’allemand RPC Bramlage a réussi à développer une pompe entièrement en plastique recyclable pour les produits de la marque Avène. Si ce système de pompe n’est pas franchement une nouveauté, la performance repose sur son mécanisme d’ouverture innovant qui isole le produit de tout contact avec l’air ambiant. Résultat, la crème se conserve mieux. Les tests ont montré qu’en effet, même après des semaines d’utilisation, aucune bactérie n’avait contaminé le produit. La marque Avène a donc choisi de se passer de conservateurs. Une première ! L’emballage est parfaitement recyclable et le flacon est partiellement conçu à partir de résine recyclée.

Même si certains y voient un simple « coup de com », l’initiative de l’américain Procter & Gamble reste notable. En mobilisant des centaines d’ONG à travers le monde, la marque a conçu un flacon pour l’un de ses shampoings composé pour 25% à partir de déchets plastiques ramassés sur les plages. Chargé de trouver la bonne formule, l’autrichien Alpla a réussi à élaborer cette nouvelle bouteille qui garantit à la fois une bonne protection du produit et la sécurité du consommateur. Un véritable tour de force quand on sait combien il est compliqué de recycler les plastiques collectés en milieu marin en raison des dégradations provoquées notamment par les UV et l’eau salée.

Enfin, plus proche des consommateurs, L’Occitane, l’un des géants français de la cosmétique, propriétaire de plusieurs centaines de boutiques dans le monde, organise son propre système de collecte en vue de recycler ses flacons. Son objectif final est de proposer d’ici 2025 des emballages 100% issus de polymères recyclés comme le rPET. Economie circulaire quand tu nous tiens…

 

La cosmétique est aussi un important consommateur d’emballages plastique. De nombreuses marques proposent désormais leurs produits dans des flacons en plastique recyclé.

Changement de régime pour les plastiques

Grande consommatrice de PET, encore lui, l’industrie des boissons a entamé depuis quelques années une réflexion destinée à se passer des plastiques issus du pétrole. Etonnamment, deux concurrents majeurs de l’eau, Danone et Nestlé Waters, se sont associés à Origin Materials, une jeune entreprise américaine, pour créer l’Alliance NaturALL Bottle. Dès lors, les trois partenaires se sont fixé comme objectif de lancer prochainement une bouteille en PET 100% biosourcé dont les matériaux d’origine ne sont pas en concurrence avec l’alimentation. Il s’agit ici de PET issu de fibres cellulosiques de diverses origines, comme les cartons usagés ou la sciure de bois, voire les pailles de riz. Un autre projet mené cette fois par Danone et Coca-Cola porte sur le PEF (polyéthylène furanoate), actuellement conçu à partir de la canne à sucre, la betterave, le blé ou le maïs. Une future génération de PEF est déjà à l’étude et trouverait sa source dans des déchets agricoles ou de papiers. Matériau d’avant-garde, ce polymère est entièrement biosourcé. Il se destinera à d’autres applications que celle du PET biosourcé, comme les boissons gazeuses ou les produits sensibles à l’oxygène, car il dispose de propriétés barrières particulièrement avantageuses.

Citons enfin les nombreuses marques qui sont passées aux polymères biosourcés pour la fabrication de capsules de café. A base de PLA (acide polylactique) et de cellophane, ces capsules ont la particularité d’être compostables ; leur taille réduite permet la mise en compost dans des bacs spécialement conçus pour les appartements.

 

A base de plastiques biosourcés, les dernières générations de capsules de café sont compostables.

L’imagination et les projets ne manquent pas, et l’on peut s’en féliciter… Ceci dit, s’épargner la vue de plastiques venant souiller la nature est simple et commence par l’acte citoyen de ne pas les jeter soi-même dans la nature mais aussi de penser à les trier. La majorité des emballages polymères sont recyclables, et ceux qui ne le sont pas finiront dans des incinérateurs où ils feront un excellent combustible pour produire de l’énergie ou de la chaleur à moindre coût. 

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