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Réchauffement climatique, les plastiques jettent le froid
Faire face au réchauffement climatique est le défi que doit relever au plus vite l’humanité afin d’éviter l’emballement. L’heure n’est plus aux débats mais à l’action. Heureusement, des solutions, qui parfois s’appuient sur les propriétés des polymères, émergent ici et là.
Réchauffement climatique, les plastiques jettent le froid
Réchauffement climatique, les plastiques jettent le froid

Captation du CO2, les polymères ont de l’appétit

Refroidir la planète est donc envisageable. Si certaines techniques ont pour base l’effet albédo, elles ne sont pas suffisantes pour faire baisser significativement la température moyenne. Raison pour laquelle, la capture du CO2, qu’il soit déjà présent dans l’atmosphère ou encore en phase d’émission – dans les cheminées des usines par exemple – est l’autre voie explorée.

Les plastiques prennent de la graine

Indéniablement, les toitures végétales ont le vent en poupe. Sur le papier, elles semblent être la panacée. Et pour cause, elles fournissent en premier lieu une isolation thermique particulièrement efficace aux bâtiments qui en sont dotés et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elles en renforcent l’étanchéité. Elles répondent également à la volonté politique qui vise à compenser par de la végétation chaque mètre carré de nouvelle surface bétonnée ou goudronnée construite.

 

Un toit végétal ne doit en aucun cas altérer la structure d’un bâtiment. La terre est donc parfaitement isolée par un millefeuille de polymères.

Surtout, les toitures végétales favorisent la réduction du CO2, puisque les plantes l’absorbent pour restituer de l’oxygène. Leur seul défaut est de ne pas pouvoir être mises en place sur tous les bâtiments… La pente ne doit pas être trop importante, et la structure solide, car un toit végétalisé, cela pèse lourd ! Pour végétaliser un toit, il ne suffit pas de jeter quelques pelletées de terre et d’attendre que la nature fasse son œuvre.

Avant de recevoir la végétation, il faut garantir à la structure une bonne évacuation de l’eau ainsi qu’une bonne isolation et, surtout, empêcher les racines de l’endommager. C’est donc un véritable sandwich technique de polymères qui s’empilent sur l’élément porteur, généralement une dalle de béton. Et si les plastiques sont préférés aux métaux, c’est avant tout parce qu’ils sont bien plus légers, insensibles à l’oxydation et à l’humidité et sont considérés comme les meilleurs isolants qui soient.
On commence ainsi par poser un pare-vapeur. Il s’agit d’une membrane ultrarésistante composée dans la plupart des cas de polypropylène et d’un voile polyoléfine empêchant toute diffusion de vapeur d’eau dans la structure. Vient ensuite un isolant. Selon les concepteurs de toitures végétalisées, il peut être en polystyrène expansé ou extrudé ou encore en polyisocyanurate, une mousse polyuréthane enrichie de cyanurate. L’avantage de cette dernière est son extrême résistance au feu ainsi que sa rigidité. C’est ce matériau qui est utilisé pour isoler les cuves des méthaniers par exemple. Puis se superpose un film de polyéthylène dont la fonction est de faire barrière aux racines les plus coriaces et les plus envahissantes. Sur ce dernier, repose un film d’éthylène-propylène-diène monomère (EPDM), un élastomère qui assure une parfaite étanchéité. Pour finir, viennent des bacs en plastiques, qui sont le plus souvent fabriqués avec des polymères. Leur fonction est de recevoir le substrat (une terre végétale allégée) et de le stabiliser pour éviter qu’il ne s’écoule en cas de fortes pluies.

La technique de mise en œuvre des toits végétalisés n’a pas grand-chose de commun avec celle des murs végétalisés intérieurs ou extérieurs. Les contraintes ne sont absolument pas les mêmes, puisque leurs fonctions diffèrent. Un mur végétal est d’abord un piège à CO2, il n’a aucune autre fonction, si ce n’est celle d’être agréable à l’œil. Ici également, les polymères ont leur importance, car le substrat est directement fixé sur une plaque de PVC, un matériau étanche qui protégera le mur.

 

Moins complexe qu’un toit, le mur végétal doit tout de même être isolé de la façade. Pour cela, les concepteurs utilisent le plus souvent des plaques de PVC.

Quant au substrat, il s’agit d’une toile de feutre imbibée en continu par des apports nutritifs, sur laquelle les racines viendront se greffer et se développer. C’est la même technique que celle utilisée dans la culture hydroponique, qui se développe de plus en plus dans les villes où de nombreux hangars sont aujourd’hui recyclés en véritables fermes urbaines. Outre la capacité à capter le CO2, largement présent dans les agglomérations, ces cultures favorisent les circuits courts.

Une bouffée de CO2 pour les polymères

En se concentrant sur le CO2 déjà émis, toutes ces techniques ont évidemment un impact positif mais qui reste insuffisant. Les choses continuent d’évoluer vite, notamment dans le domaine des transports (Véhicules de demain : les polymères pèsent lourd dans la balance) ; et de nombreuses startups cherchent à mettre au point des machines capables d’aspirer le CO2. Parmi les plus avancées, on peut citer le suisse Climeworks qui, depuis 2009, cherche à capturer le CO2 de l’air ambiant en le filtrant. L’entreprise s’est fixée pour objectif d’extraire 1% du CO2 émis dans le monde d’ici à 2025 ; c’est-à-dire demain !

Leurs « machines » se composent de collecteurs de CO₂ modulaires, qui peuvent être empilés en fonction de la puissance d’aspiration souhaitée et qui sont uniquement alimentés par des sources d’énergie verte comme le solaire.

D’un point de vue théorique, le processus est assez simple. Les collecteurs capturent le CO2 en le piégeant dans une membrane constituée d’un matériau filtrant hautement sélectif. Difficile de connaître la nature exacte de ce filtre, si ce n’est qu’il s’agit d’une innovation polymérique… Une fois que le filtre arrive à saturation, le collecteur est fermé, puis l’ensemble est chauffé entre 80 et 100 °C pour libérer le CO2. Celui-ci, pur et ultraconcentré, est alors collecté. Climeworks compte actuellement dix-sept usines en exploitation ou en construction dans toute l’Europe, les plus emblématiques étant celles situées en Suisse ou en Islande. Quant au CO2, une fois prélevé, il peut être injecté profondément dans le sol où il se minéralisera avec le temps.

Mieux encore, il peut être revendu en tant que matière première à des industriels qui en ont besoin. Un accord d’importance a été conclu dans ce sens entre Climeworks et Valser, une marque d’eaux suisse qui utilise désormais ce CO2 hautement purifié pour gazéifier ses eaux pétillantes.

La réutilisation du CO2 collecté est par ailleurs un véritable sujet d’actualité et source d’intéressantes initiatives, comme celle de l’allemand Covestro, qui capte ce gaz pour le réintroduire dans des mousses de polyuréthane par exemple.

Climeworks, de son côté, veut aller encore plus loin et travaille actuellement à trouver des solutions d’élimination totale du CO2 après sa récupération. L’entreprise se dit tout près du résultat et espère être en mesure d’en éliminer plusieurs milliers de tonnes dès cette année.

© Climeworks Orca CEOs Jan Wurzbacher_Christoph Gebald 2 Climeworks Copyright Climeworks

Capturer le CO2 directement dans l’atmosphère est la technique développée par quelques startups dans le monde, dont le suisse Climeworks. Une technologie qui s’appuie sur des membranes polymères.

Enfin, en partant du principe que, pour lutter contre l’excès de CO2, le mieux est encore de ne pas en émettre, d’autres laboratoires se penchent sur le moyen de le capter au moment de la postcombustion des fumées d’usines, c’est-à-dire à la sortie des cheminées. Cette méthode est nommée « séquestration ». Dans les faits, la fumée passe dans des filtres à très haut rendement, constitués d’une membrane poreuse, elle-même composée de polymères capables de sélectionner spécifiquement le CO2 dans des mélanges gazeux. Par ailleurs, la chaleur dégagée par les fumées amplifie les processus chimiques à l’œuvre lors de la séquestration. Encore en phase de développement, cette technique pourrait être également une solution d’avenir pour tous les véhicules à moteur à combustion. A moins que, d’ici là, ils soient tous électriques…

 

Pour connaître en détail les avancées de cette technologie, voir notre interview EPFL

 

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