Showa : la perfection à portée de main
Peu connue du grand public, la marque Showa est parmi les leaders mondiaux dans son domaine. Quel est l'historique de cette marque ?
Showa est née de la vision d’un homme, Akeo Tanaka, un Japonais. Lors de la guerre de Mandchourie, dans les années 1930, comme beaucoup de ses compatriotes, Akeo Tanaka s’est retrouvé sur le front dans des conditions climatiques extrêmes. Face au froid intense, nombreux sont ceux qui perdirent leurs doigts à la suite d’engelures, et ce malgré des gants en peau de lapin. Démobilisé, alors qu’il travaillait dans une usine produisant des cartouches d’encre en PVC, il chercha un moyen de protéger les mains du froid et eut l’idée de plonger un gant de coton dans un bain de PVC. C’est ainsi qu’en 1953 est né le premier gant en PVC. Il fonda par la suite Showa, une entreprise qui allait changer à jamais le secteur du gant de travail.
Aujourd'hui, êtes-vous présents dans tous les secteurs concernés par les gants de travail ?
Quasiment, mais ce n’est absolument pas notre objectif premier. Le succès des entreprises japonaises comme la nôtre repose avant tout sur le zéro défaut. Nous avons pour principe d’être présent sur un marché uniquement si nous sommes certains d’y proposer un produit parfaitement en adéquation avec les besoins de ce secteur. Aujourd’hui notre savoir-faire est reconnu dans les domaines de la manipulation, de la protection des coupures, de la protection chimique aussi bien que thermique, ainsi que dans ceux des gants antistatiques et à usage unique. Si nos produits ont un tel succès, c’est aussi parce que nous avons une politique d’innovation perpétuelle. D’ailleurs, une de nos devises est : « Ne jamais imiter, toujours innover. »
Vous disposez donc d'un centre de recherche ?
C’est même bien plus que cela puisque nous maîtrisons intégralement nos procédés de fabrication, de conception et d’inspection, nous créons nos propres machines, nos fibres, certains de nos polymères et les moules. Là aussi nous avons innové, car nos moules reproduisent la position naturelle de la main au repos. Ainsi moulés, nos gants sont d’un confort incomparable puisqu’ils sont réellement ergonomiques.
Ce niveau de contrôle inégalé alimente notre procédé d’innovation. Ainsi nous développons des produits et des technologies inimitables qui nous donnent un net avantage sur nos concurrents. Pour en revenir à notre centre de recherche, ce sont quotidiennement une centaine d’ingénieurs et de chercheurs chimistes qui travaillent à la découverte de nouveaux polymères répondant à des caractéristiques bien précises.
Vous n'êtes donc pas en contact avec les grands industriels des plastiques ?
Si, bien sûr, certaines fibres comme le Kevlar ne sont pas fabriquées par nos soins. Nous avons même des rapports très étroits avec ces industriels à qui nous demandons parfois de travailler à l’élaboration de fibres bien particulières. Nous avons la chance de produire de très importants volumes, nous sommes donc de gros clients pour l’industrie chimique. Elle n’hésite donc pas à nous accompagner dans la mise au point de nouveaux polymères. Pour vous donner une idée, dans l’industrie automobile, les employés chargés de la manutention ont des gants neufs en moyenne tous les deux jours. Au final, cela fait plusieurs centaines de milliers de paires par an.
Quels sont les polymères que vous avez conçus ?
Il y a en beaucoup. Dans le domaine des gants anticoupure, nous avons créé Hagane Coil™, notre propre fibre. Cette fibre brevetée associe l’acier inoxydable Hagane (le même que celui utilisé dans les fameux sabres japonais) au polyester et/ou aux fibres aramides afin d’offrir des niveaux élevés de protection contre les coupures. Les gants résistent à la pression d’une lame jusqu’à 45 newtons (4 500 g). A ce jour, ce sont les seuls gants sur le marché capables de résister à une telle pression. Nous sommes aussi les inventeurs du premier gant à usage unique en nitrile au monde. Le nitrile, parfois appelé caoutchouc-nitrile, est un polymère de la famille des élastomères, qui a toutes les caractéristiques du latex mais qui, contrairement à celui-ci, est hypoallergénique.
Dernièrement, nous avons fait évoluer cette matière en la rendant biodégradable. Nous avons réussi à introduire dans le nitrile des matières organiques qui favorisent l’activité microbienne et accélèrent la biodégradation. De cette décomposition résultent des biogaz et de l’humus inerte. L’environnement durable est d’ailleurs l’une de nos valeurs les plus fortes. Au Japon, nous avons monté une filière de recyclage des gants de Nylon enduits de PVC, dont nous organisons la collecte. Nous avons élaboré un process qui permet de séparer le Nylon du PVC, ce dernier étant ensuite broyé et parfois réutilisé dans d’autres objets.
Après une vingtaine d’années de recherches environ, nous avons réussi à concilier, dans un même gant, des caractéristiques apparemment contraires mais cruciales : l’imperméabilité et la respirabilité. Nous pensions alors que la respirabilité et les propriétés d’imperméabilité pouvaient répondre aux besoins du marché agricole. Dans ce secteur, les ouvriers travaillent dans un environnement humide et ont tendance à ressentir un inconfort dû au fait que leurs mains deviennent mouillées au fur et à mesure de l’effort. Nous avons ainsi lancé le gant Temres. Il repose sur une technologie qui se fonde sur la différence de taille entre les molécules d’eau et de vapeur d’eau. Les molécules d’eau (à l’état liquide) ont en effet un diamètre compris entre 100 et 3 000 µm, alors que celui des molécules de vapeur d’eau/d’humidité est de 0,0004 µm.
Nos ingénieurs ont tiré parti de cette différence significative de taille entre les molécules pour mettre au point deux membranes principales pour ce gant : la première pour la respirabilité et la seconde pour l’imperméabilité. Plus concrètement, l’une des membranes est fabriquée en mousse de polyuréthane poreuse, qui contribue à l’évacuation de l’humidité et permet aux mains de sécher rapidement. Placée plus à l’extérieur, la seconde couche est réalisée en polymère hydrophile, qui est perméable aux molécules d’humidité mais pas à l’eau
Quel est le gant de travail idéal ?
Penser qu’un bon gant doit seulement répondre aux normes en vigueur et éviter les différents risques auxquels sont confrontés les utilisateurs serait une erreur. La réalité est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. En fonction de son métier, de ses conditions de travail et du type d’opération qu’il réalise, l’utilisateur doit toujours bénéficier du meilleur confort. Sans cette indispensable qualité, la sécurité en sera considérablement diminuée. Pour être bien porté, il faut que le gant soit d’abord parfaitement ajusté à la main de l’utilisateur. Si des tâches nécessitent une dextérité particulière, il doit offrir la meilleure préhension possible. Dans le cas d’une manipulation d’objets glissants, par exemple, un grip spécifique lui est ajouté afin d’apporter la meilleure adhérence possible. A l’extérieur comme à l’intérieur et selon la température ambiante, un gant doit être respirant et maintenir si besoin les mains au chaud.
Enfin, j’ajoute qu’il est important qu’il reste relativement bon marché… Nous cherchons toujours à satisfaire l’ensemble de ces points, et c’est bien pour cette raison que nous restons en contact permanent avec nos clients. Leurs commentaires sont précieux et ils sont très souvent pour nous source d’innovations.