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Les plastiques tombent sous le sens
Les plastiques et les cinq sens… Un sujet pas si incongru, car quand il est question de nous aider à sublimer nos sens, les polymères sont bien souvent de la partie.
Les plastiques tombent sous le sens
© Boulenger Xavier / Shutterstock.com
Les plastiques tombent sous le sens

Les polymères en mettent plein la vue

Il suffit en général d’un simple coup d’œil pour nous faire une première idée de la qualité, voire de la valeur d’un objet. Les fabricants d’automobiles l’ont depuis longtemps assimilé. Dans les années 1970, alors que les polymères (le plus souvent du polypropylène) commençaient à s’imposer dans les voitures, les constructeurs prêtaient assez peu d’attention au design et encore moins à l’aspect visuel des plastiques utilisés. Les concepteurs les plus innovants leur donnaient parfois une texture grainée pour jouer un peu avec la lumière, ou même osaient les teindre dans la masse pour les différencier des traditionnels plastiques noirs. Si les plastiques ont été bien accueillis au début pour leur côté moderne, ils ont rapidement eu une image de matériau peu valorisant. Les industriels ont alors cherché à les rendre plus glamours.

 

Les plastiques sont particulièrement prisés des constructeurs automobiles, notamment pour leur capacité à valoriser les intérieurs des véhicules.

C’est alors qu’ils sont devenus moussés, ultra-lisses, brillants, ou qu’ils ont cherché à reproduire l’aspect visuel du bois précieux ou de l’aluminium brossé… pour le seul plaisir des yeux. Aujourd’hui, les intérieurs des voitures sont encore en polypropylène (PP) mais également en ABS (acrylonitrile butadiène styrène) ou PVC (polychlorure de vinyle), des plastiques qui autorisent toutes les fantaisies. Rappelons au passage que, si les polymères ont peu à peu fait leur entrée dans nos automobiles, c’est avant tout pour leur faire perdre du poids et ainsi gagner en performance tout en consommant moins. C’est également pour des questions de sécurité, puisque les polymères sont sans pareils pour absorber les chocs. Aujourd’hui les polymères sont toujours aux avant-postes car ils rendent nos véhicules toujours plus sûrs et plus propres en diminuant leurs émissions de CO2.

Si l’automobile reste l’exemple très souvent cité quand on évoque la qualité perçue des plastiques, c’est également vrai dans les domaines high-tech (coques d’ordinateurs, de téléphones…), mais aussi dans l’ameublement et plus généralement dans tout ce qui touche de près ou de loin au design.

Les polymères en transparence

S’il est un polymère qui sait particulièrement se mettre en valeur et, de surcroît, renforcer une image de marque, c’est bien le PMMA (polyméthacrylate de méthyle). Souvent transparent, il est fréquemment utilisé pour remplacer le verre, car il est nettement moins lourd et surtout incassable. Mais pas que… loin s’en faut ! En lui ajoutant des additifs, qui sont autant de secrets bien gardés, les industriels ont réussi à lui donner des aspects étonnants. Ce polymère se décline de toutes les couleurs et peut prendre des allures de métal, velouté ou encore fumé. C’est l’une des raisons pour lesquelles on le retrouve dans nombre d’enseignes ou de mobilier d’aménagement de magasins. Il est dans sa nature de valoriser les objets qu’il contient ou supporte car il sait très bien « accrocher » la lumière.

© Altuglas

Quand il est question de jouer avec la lumière, le PMMA est capable de prouesses étonnantes.

Le français Altuglas®, leader mondial du PMMA, propose des produits surprenants, comme cette plaque qui a la faculté de s’illuminer lorsqu’elle est éclairée par la tranche, ou encore cette autre qui change carrément de couleur une fois éclairée. C’est elle qui a la préférence des enseignistes car ils savent qu’ainsi la marque de leurs clients attirera l’œil à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit avec ce petit côté magique en plus.

Réfracter harmonieusement la lumière est bien l’un des grands atouts des polymères, et c’est l’une des raisons pour lesquelles ils font le bonheur de nombreux designers créateurs de mobilier extérieur et autres pots lumineux si bluffants une fois illuminés. Les plastiques sont également très simples à mouler. Pour les designers, c’est une bénédiction car ils ont conscience que les procédés de fabrication ne seront jamais un frein à leur créativité.

Savoir jouer avec la lumière, être capable de prendre facilement toutes les formes et textures sont des caractéristiques propres aux polymères, mais ce n’est pas là leur seule qualité pour « flatter » la vue. En effet, la transparence de certains polymères comme le polycarbonate, le polystyrène, le PET et le polypropylène est un autre atout, notamment dans le domaine de l’emballage. Et pour cause, les consommateurs que nous sommes aimons nous rassurer en voyant ce que nous achetons.

Les plastiques touchent du doigt la perfection

Le mécanisme du toucher est complexe et fait appel aussi bien au cerveau qu’aux milliers de capteurs sensoriels présents dans la peau. Si, d’un simple regard, nous sommes capables de tirer beaucoup d’informations sur un produit, les compléter par le toucher rend notre jugement plus sûr. Ici encore, les matériaux plastiques sont ceux qui offrent la plus grande diversité de touchers.

 

De nombreux outils sont désormais équipés de manches en plastique soft touch. S’ils sont très agréables au toucher, ils ont en plus l’avantage de rester bien en main.

Leur facilité de transformation se prête bien à l’obtention d’aspects de surfaces remarquables, tels que des grainages plus ou moins rugueux ou profonds. Ils peuvent être « moussés », selon que l’on recherche plus ou moins d’enfoncement et d’élasticité sous la pression des doigts, plus ou moins collants pour assurer une bonne préhension, avec plus ou moins de soft touch

Le tout est de choisir le bon polymère (souvent des élastomères thermoplastiques, TPE) et les bons additifs parmi une très longue liste. Les exemples d’application ne manquent pas : manches de brosses à dents et de rasoirs, poignées d'outillages, de raquettes de tennis, de VTT, de stylos, de boîtiers de portables ; ou dans la voiture : couvercles d’airbags, éléments de tableaux de bord, pommeaux de leviers de vitesses… En général, les TPE se présentent sous la forme d’une peau collée sur un autre polymère qui a pour rôle d’assurer les propriétés mécaniques. Différentes techniques (coextrusion, surmoulage…) sont possibles et dépendent de l’affinité chimique des deux matériaux. Par exemple, les TPE s’accrochent naturellement sur le polyéthylène et le polypropylène. Depuis peu, la bonne formulation a été trouvée pour leur permettre d’adhérer sur les polyamides. C’est ainsi que sont dernièrement apparus des capots d’aspirateurs munis de poignées soft touch. Ce n’est certes pas indispensable mais cela les rend nettement plus attrayants et donc désirables.

 

Les plastiques imitent à la perfection d’autres matériaux, comme le bois ou la fourrure. Impossible de les différencier même après une caresse !

Les rois de l’illusion

Ainsi, d’une simple caresse nous sommes capables de définir la texture (piquant, lisse, rugueux...), d’une petite pression, la consistance (dur, mou, moelleux...) et bien entendu la température (chaud, tiède, froid...).

Ces sensations, nous les associons généralement à la qualité.

Revers de la médaille, les plastiques peuvent tromper nos sens, comme on peut le constater sur certains véhicules à bas prix de marques étrangères qui utilisent des plastiques aux qualités psychosensorielles formidables, mais qui ne franchissent pas le cap des rigoureux tests européens, sésame obligatoire pour pénétrer nos territoires. L’inverse est aussi vrai, notamment en ce qui concerne l’habillage des intérieurs d’avions. Ce sont souvent des polymères neutres, blancs, peu valorisants… Oui, mais s’ils ont été choisis, c’est avant tout parce qu’ils répondent à des normes de sécurité draconiennes. Par exemple, ils sont conçus pour dégager le moins de fumée possible en cas d’incendie et ainsi rendre moins compliquée une évacuation d’urgence. Il est intéressant de noter qu’ici aussi les fabricants se refusent à dévoiler leurs secrets. On parle souvent de matériau composite thermoplastique hybride.

Aujourd’hui la variété des polymères est telle qu’il y en a pour tous les goûts et toutes les audaces. Mieux encore, on les trouve dans tous les domaines, notamment dans les textiles, qui ont connu une véritable révolution avec l’apparition du Nylon®, un polyamide qui reproduisait à merveille l’apparence et le toucher de la soie. Dans l’ameublement aussi, il existe une variété de PMMA au toucher soyeux. Enfin, n’oublions pas le PVC qui imite si parfaitement le cuir ou la fourrure.

Des polymères bien dans leur peau

Les plastiques sont capables de tours de force encore plus spectaculaires. De nombreux laboratoires de recherches se sont mis en tête de créer une véritable peau artificielle à base de polymères. Ainsi, à Stanford, aux Etats-Unis, les chercheurs peaufinent la mise au point d’une peau artificielle destinée aux prothèses. Elle se présente sous la forme d’une feuille de plastique (probablement un élastomère) munie de nanocapteurs constitués de nanotubes de carbone en forme de pyramides capables de transmettre un message tactile aux cellules nerveuses. Le porteur de la prothèse retrouve ainsi la sensation du toucher. Les premiers tests sont concluants…

Parfois en revanche, on se demande bien à quoi vont pouvoir servir certaines découvertes… Comme celle de chercheurs français et britanniques qui viennent de créer une peau à partir de silicone moulé dans laquelle ils ont incorporé une grille d’électrodes. Ils ont ensuite recouvert l’ensemble d’une autre variété de silicone imitant la peau humaine. Il ne faut pas y voir quelque progrès médical mais plutôt une autre façon d’appréhender les objets du quotidien.

© Skin-on

Skin-On est une peau artificielle en silicone qui réagit selon qu’elle est pincée, caressée… Couplée à une télécommande par exemple, elle pourrait entraîner des applications amusantes.

Ainsi, il suffit de gratter, caresser, pincer, tapoter la peau d’une télécommande de jeu pour faire agir le personnage d’un jeu vidéo. Cette télécommande verra-t-elle le jour ? En tous les cas les chercheurs l’espèrent et ont déjà baptisé cette peau artificielle Skin-On. Reste à lui trouver des applications intéressantes pour la rendre commercialisable… 

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