Paroles d'expert 4 min

Wingman s’élance sur les ailes du désir

Rencontre avec Paul Breur, fondateur de la société et concepteur du Wingman Condom, lauréat du IF Design Award 2014, l’une des plus prestigieuses récompenses internationales.
Wingman s’élance sur les ailes du désir
Wingman s’élance sur les ailes du désir

Comment est né le concept Wingman ?

Le concept Wingman est né la frustration personnelle d’un groupe de copains, anciens étudiants en ingénierie à l’Université de Delft, au Pays-Bas. Nous n’acceptions pas le fait que, depuis 100 ans, l’usage des préservatifs n’avait connu aucune évolution significative. 
En dépit de toutes évolutions apportées sur les couleurs, les parfums et les textures, un problème fondamental demeurait : un produit aussi indispensable et courant que le préservatif n’était finalement pas si facile à utiliser. Fort de ce constat, nous avons réalisé une enquête auprès d’environ 1500 utilisateurs, en vue d’apporter une solution technique à ce problème.

Quels enseignements en avez-vous tiré ?

Les résultats ont confirmé notre intuition initiale. Et surtout, ils ont révélé les obstacles pratiques à l’usage des préservatifs. Parmi les principales préoccupations, les utilisateurs affirmaient notamment qu’il était souvent difficile de mettre le préservatif correctement. Et que ces difficultés de manipulation occasionnaient souvent une interruption qui perturbait la relation et rendait l’acte sexuel moins spontané.

 

 

A quels défauts «techniques» étaient liées ces difficultés ?

Ils sont nombreux et surviennent, parfois, dès l’ouverture de l’emballage. Lorsqu’on le saisit, il n’est pas toujours aisé de distinguer l’envers de l’endroit. Cette confusion est source de risques. Par exemple, si l’utilisateur place le préservatif à l'envers, par erreur, il ne pourra pas le dérouler. Et s’il essaie à nouveau, après retournement, il y a un risque que la face extérieure ait été en contact avec des fluides contaminants.
Certains utilisateurs déploraient l'odeur de latex désagréable et persistante sur les doigts. D’autres, un ajustement du préservatif trop lâche ou trop serré, suivant la taille du pénis.
Finalement, nous avons constaté que beaucoup de ces préoccupations, jugées perturbantes lors de la relation sexuelle, traduisaient un sentiment d’insécurité.

Ce constat vous a-t-il encouragé à mettre améliorer la fiabilité du produit ?

Assurément mais pas dans le sens où on l’imagine. Aujourd’hui les préservatifs sont des produits sûrs et fiables car ils sont soumis à des normes très strictes. La plupart des défaillances ne sont pas liées à un défaut de fabrication mais à une mauvaise utilisation. La majorité des grossesses et des maladies sexuellement transmissibles contractées sont la conséquence d’une mauvaise manipulation du préservatif. Notamment, lorsqu’il a été endommagé par les ongles ou des bijoux.
Notre objectif était de développer un préservatif, non pas plus résistant, mais plus facile et plus rapide à mettre en place. Cela afin d’éviter les erreurs de manipulation par la conception plutôt que par des précautions.

Quelles réponses avez-vous imaginées ?

La clé résidait dans l’exclusion de tout contact entre les doigts et le préservatif. Dans cette optique, nous avons d’abord conçu différents prototypes d’applicateurs dont l’efficacité a été évaluée par des utilisateurs. Une première version de notre applicateur a été développée en 2006 comme un accessoire. 
Cette démarche était sans avenir, évidemment ! En effet, qui aurait acheté une attache dans laquelle il fallait insérer un préservatif pour le dérouler plus facilement et plus rapidement?

 

Mais vous n'avez pas abandonné votre idée initiale pour autant ? 

Non, car la solution nous est apparue rapidement en abordant le problème en terme de fabrication. Nous avons donc développé un applicateur en forme d’ailettes pré-assemblé avec le préservatif. Dans ces conditions, il répond parfaitement aux attentes du cahier des charges initial. La forme des ailettes assure une bonne visibilité du sens de déroulement du préservatif ce qui est fondamental pour sa bonne utilisation mais qu’aucune autre marque n’avait jugé bon d’améliorer.
Autre avantage, il n’est pas nécessaire de toucher le préservatif. Il suffit de saisir les ailettes avec une ou deux mains pour dérouler le préservatif jusqu'à la base du pénis où elles se détachent automatiquement. Pas de contact direct, donc pas d'odeur désagréable ni dommage sur le produit. Cela permet de proposer des préservatifs ultra-minces qui procurent des sensations plus naturelles sans compromettre la sécurité.

Ce clip en plastique a-t-il imposé des changements dans la conception et la fabrication des préservatifs ?

Le concept Wingman d’applicateur n’a aucune incidence sur la conception du préservatif. La technique de fabrication du produit brut, avant lubrification et emballage, est essentiellement la même. En revanche, l’assemblage du préservatif et de l'applicateur, en usine, et l'emballage de l’ensemble ont nécessité des changements dans la phase finale du processus de fabrication.

Le choix du plastique s'est-t-il imposé d'emblée ? Avez-vous envisagé d'utiliser d'autres matériaux ?

Nous avons envisagé plusieurs matériaux pour répondre aux exigences en termes de résistance, de taille, de poids, de forme et de coût. Mais le recours aux matières plastiques s’est imposé très vite. En effet, les ailettes et la charnière de l'applicateur sur laquelle le préservatif est enroulé étant très minces, nous recherchions un matériau à la fois flexible et résistant. Il devait supporter, par exemple, la pression d'un adulte assis lorsque le préservatif est dans une poche arrière. En outre, nous avions des exigences élevées en termes de surface car l'applicateur doit être très lisse pour ne pas endommager le préservatif et surtout permettre de le dérouler facilement. Enfin, les coûts de transformation devaient être suffisamment bas pour proposer un produit complet capable de rivaliser avec les préservatifs classiques. Le polypropylène (PP) et le polyéthylène haute densité (PEHD) répondent bien à ces exigences mais d'autres polymères sont également envisageables.

Actuellement, vous ne proposez que des préservatifs en latex naturel. Votre "clip" est-il compatible avec les préservatifs en polyuréthane ou de polyisoprène ?

Oui, notre applicateur convient parfaitement aux préservatifs sans latex en en polyuréthane ou en polyisoprène, à condition cependant d’utiliser, lors de la fabrication, un lubrifiant approprié. 
La raison pour laquelle nous n’avons pas encore lancé une gamme de préservatifs sans latex est purement commerciale. Si la demande de non-latex s’avère significative, nous envisagerons sans doute le lancement d’un Wingman de ce type.

 

Comment revendeurs et utilisateurs ont réagi au concept Wingman ? Est-il installé maintenant sur le marché face à des marques reconnues qui sont de puissants concurrents ?

Nous avons lancé le préservatif Wingman à la fin de 2013, en nous concentrant sur notre marché domestique, les Pays-Bas… En privilégiant d’abord la vente en ligne sur notre site.
Cette première phase de commercialisation nous a permis de constater le haut niveau de satisfaction des clients confirmé, par ailleurs, par leur grande fidélité.
Nous avons lancé, il y a quelques mois, une nouvelle phase de commercialisation à travers un réseau de revendeurs, en magasin ou en ligne. En concurrence avec de très grandes marques, nous cherchons à sélectionner nos partenaires parmi les revendeurs les plus motivés par le concept Wingman.  Ceux qui ont sauté le pas ont toutes raisons d’être satisfaits car ils ont vu croître leur vente de préservatifs.

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